La sortie imminente de Grave en VOD (le 21 juillet) et en DVD/blu-ray (le 26, édités par Wild Side Vidéo) est l’occasion d’un petit bilan concernant le film-événement de Julia Ducournau. On peut introduire l’exercice par quelques données comptables qui, mathématiquement, prouvent que la bête en impose : quatorze récompenses remportées en festival, dont quatre prix du meilleur film plus un Méliès d’Or décerné en octobre dans le cadre du BIFFF, et un cumul de 150.000 entrées France. Of course, avec ce dernier chiffre, le film est loin de se qualifier pour le titre de champion du box office 2017, mais pour une production horrifique francophone, qui plus est interdite aux moins de 16 ans, le score est digne d’éloges (précisons que le film a tenu de nombreuses semaines à l’affiche des salles d’Art & Essai qui l’ont projeté ; des exploitants n’ont pas manqué de le réintroduire dans leur programmation lors de la récente Fête du Cinéma et, si vous passez la semaine prochaine par Dijon, vous verrez que le cinéma l’Eldorado le propose encore à ses spectateurs).

Inutile de revenir ici sur le film lui-même (pour cela, lisez ou relisez notre critique publiée en janvier dans la foulée du Festival de Gérardmer 2017). Mieux vaut se pencher sur le contenu du DVD, qui offre naturellement quelques bonus : deux scènes coupées (l’une, fantasmagorique, s’avère des plus cocasses mais détonait sans doute trop avec le reste du métrage ; l’autre, plus anecdotique, dévoile un moment nocturne dans la piaule de Justine et Adrien, qui rentre ivre mort d’une soirée) et, surtout, un long entretien de trois quarts d’heure avec la réalisatrice, mis en scène avec simplicité (de quoi d’asseoir, un cactus, une étagère de DVD). Les propos sont entrecoupés de brefs extraits du film. Julia Ducournau évoque ses choix de casting (notamment celui de Garance Marillier pour le premier rôle), de lumière, de musiques, revient sur le tournage de quelques séquences-clés et sur le recours à telle ou telle figure iconographique à même de servir son propos, comme l’usage de la licorne, un symbole forcément lié à l’enfance pour Julia (ce qui ne manque pas, au passage, de nous faire un peu tiquer : on a beau être des grands, à « la Chimère », on est tous amoureux des équidés à corne et autres bêtes fantastiques !).

L’interview passe en revanche à peine sur l’œuvre de Sade, tout juste cité et qui a en partie influencé Grave (à commencer par le prénom de l’héroïne). Julia Ducournau aurait pu s’attarder plus sur ses lectures, même si elle déclare qu’à son avis, peu de monde aujourd’hui a jamais ouvert un bouquin du marquis. Elle montre en tout cas qu’elle a une foule de choses passionnantes à dire sur son film, sur sa — longue — gestation et sur son tournage autant que sur l’objet fini. Dommage, en fait, que la cinéaste ne se soit pas pliée à l’exercice du commentaire audio, dans lequel elle n’aurait pas manqué d’expliciter davantage de détails cruciaux de sa mise en scène. Le résultat aurait été plus riche encore et surtout plus pédagogique qu’une discussion statique de 45 minutes, du reste menée par le journaliste Fausto Fasulo (de Mad Movies), présent à l’image et souriant mais dont les penchants vestimentaires attirent vainement l’attention et, sur la longueur, fatiguent la rétine. En somme, tout le contraire des tempéraments sexy, gore et cannibales du film de l’élégante Julia.

En plus de l’entretien avec Julia Ducournau, le blu-ray proposera un supplément équivalent avec la comédienne Garance Marillier (mais que nous n’avons pas vu). Les deux éditions contiendront en revanche l’une et l’autre un sous-titrage pour sourds et malentendants ainsi qu’une option d’audiodescription pour aveugles et malvoyants. Et bien sûr, avant de pouvoir mettre la main sur ces jolies galettes, n’oubliez pas de (re)découvrir notre entretien avec Julia Ducournau, mis en ligne à la sortie du film dans les salles en mars dernier.