Warhammer est devenue une véritable institution dont la version jeu de figurines constitue à la fois le point de départ et, encore aujourd’hui, le coeur de la licence. L’arrivée d’une nouvelle édition est donc toujours un événement. C’est d’autant plus le cas ici que ce vénérable ancêtre a pris l’habitude d’alterner mise à jour mineure et majeure. La 6e édition constituait une évolution importante, la 7e édition une remise à niveau plus légère, cette 8e édition est donc attendue comme une édition majeure.

Cette critique concerne le livre de règles de base, premier disponible de la gamme qui comprend aussi une boite de base incluant deux armées et un extrait du présent ouvrage (les règles uniquement).

 


Warhammer Battle pour les débutants

Pour ceux qui ne connaissent pas, il convient de revenir rapidement sur les concepts de Warhammer Battle – le « Battle » permet de le distinguer des autres jeux se déroulant dans le même univers.
Warhammer est un jeu de bataille dans lequel deux armées, chacune contrôlé par l’autre joueur, s’affrontent. Le jeu se joue sans plateau, toutes les distances étant mesurées avec un mètre plutôt qu’avec des cases, et avec des figurines pour représenter les combattants et mieux plonger les joueurs dans la fureur des combats que ne l’auraient fait des bouts de carton.
C’est un jeu-passion qui nécessite un certain investissement, tant par ses règles loin d’être insurmontables mais qui nécessitent un peu de temps pour être maitrisées, que par le temps et le matériel requis. Chaque armée compte en effet en moyenne une centaine de figurines, auxquels s’ajoutent des décors et quelques accessoires.
Les armées ne sont pas fixent : chaque joueur, après avoir choisi un camp (les chevaliers de la Bretonnie, les orcs et gobelins, les vampires, les nains… plus d’une douzaine sont disponibles) va composer son armée à l’aide de règles de construction qui garantissent l’équilibre entre les joueurs et d’un livre d’armée, à acheter séparément, qui liste toutes les options possibles pour un camp donné. Les figurines doivent ensuite être obtenues séparément – elles sont vendus par groupe pour les combattants les plus communs, ou à l’unité pour les plus imposantes comme les dragons, que l’on n’inclus généralement qu’en un seul exemplaire dans son armée.
Pour jouer, il faut donc disposer : du livre de règle, d’un livre d’armée par joueur, et des figurines correspondantes. Un moyen simple, et très économique de démarrer consiste en fait à acheter la boite de base du jeu, qui regroupe tous ces éléments en version « light » : un livre de proche ne reprenant que la partie règle du livre complet, deux petites armées, et tous les accessoires nécessaires pour jouer comme un set de dès.


 

 

Commençons par ce qui ressort naturellement en premier lorsque l’on tient pour la première fois l’ouvrage en main : voilà du lourd, du très lourd ! Cette 8e édition compte plus de 500 pages couleurs sur un papier glacé épais et sous une couverture bien rigide. Ce choix peut paraitre surprenant si l’on ajoute que seul le quart de l’ouvrage (la partie règle) est véritablement indispensable, et qu’à ce titre, les joueurs lui préférons la version poche disponible dans la boite de base – celle-ci ne comprend que les règles et est nettement plus transportable.

La démarche est pourtant claire et logique: Warhammer Fantasy Battle est le coeur du hobby qui permet aux autres branches (jeux vidéo, jeux de carte, BD…) de vivre, et ce livre de base y occupe une position centrale. Il ne s’agit donc pas d’en faire un simple livre de règles mais bien de poser les bases de la licence qui comprend aussi un vaste univers, un aspect décors et figurines, le tout lié dans les batailles scénarisées que se livreront les joueurs.

L’ouvrage est donc découpé selon cette même logique : les règles, l’univers, le modélisme (peinture et décors) et les batailles, chaque partie couvrant son sujet de manière aussi exhaustive que possible – toutes les factions du jeu sont par exemple passées en revue. Cette approche, sans être complètement nouvelle, n’a jamais été poussée aussi loin. Les batailles s’offre ainsi pour la première fois une section complète – c’est l’une des principales nouveautés de cette édition – pour permettre aux joueurs de revivre des événements de l’histoire officielle de l’univers.

La force de cette interpénétration du ludique et de l’univers tient aussi à la qualité du produit. Games Workshop prouve une nouvelle fois ici sa maitrise sans faille de l’édition. L’ouvrage est parfaitement structuré et chapitré malgré le nombre de sujets abordés, la maquette est absolument impeccable et lie sans à-coup photos de figurines et illustrations. Ces dernières font ressentir au lecteur toute la saveur de Warhammer au premier coup d’oeil. C’est simple, cinq minutes à feuilleter ce livre donne envie de se plonger dans le jeu !

Ces évolutions constituent le coeur de cette nouvelle édition, plus que les règles dont les changements sont plus discrets – ce n’est pas un mal en soit, car avec plus de 20 ans de carrière le jeu est aujourd’hui bien rôdé.

Principale modification, l’introduction de plus de hasard à divers endroits du système. Les charges se font désormais sur 2d6, et non au double du mouvement de l’unité – la cavalerie bénéficie bien entendu d’un bonus. Les dès de magie sont déterminés par le résultat de 2d6 et non plus par le nombre et le niveau des sorciers présents sur le champ de bataille. Ceux-ci permettent juste d’obtenir un dès supplémentaire sous réserve d’obtenir un 6 sur un jet d’1d par magicien. Ce rééquilibrage entre hasard et stratégie est avant tout affaire de gout. En revanche, il se fait clairement au désavantage de la fluidité en imposant des jets de dès supplémentaires à un système qui n’en manquait déjà pas.

La magie reste en revanche sur le même chemin entamé depuis la 6e édition, c’est à dire une magie moins puissante en particulier pour les sorts de dégâts directs. Ce d’autant que désormais, les sorts irrésistibles entrainent aussi un jet sur la table des fiascos… dont les résultats ont été revus la hausse. Ouch !

Une autre nouveauté importante concerne les combats au corps à corps. Désormais, les figurines de second rang apportent une attaque supplémentaire par figurine, ainsi que la moitié des figurines des troisièmes si l’unité fait dix figurines de large ou plus – les règles parlent de "horde" dans ce cas. Sachant que les musiciens permettent maintenant d’enchainer un mouvement après une reformation, augmentant ainsi la mobilité des armées, les batailles devraient s’enrichir de grosses unités – les bonus déjà présents dans la précédente édition, comme le bonus de +1 au résultat de combat pour l’unité la plus importante, sont préservés.

Le dernier point notable concerne les terrains. Les règles s’enrichissent d’un catalogue de terrains offrant de véritables interactions avec les unités. Un réceptacle magique ici améliore les capacités des magiciens à proximité, un symbole par là augmente le moral des troupes, etc.

Au global, il est clair que les vieux de la vieille seront probablement déçus par la part grandissante de hasard dans le jeu. Mais d’une part, Warhammer n’a jamais prétendu être aussi stratégique qu’un wargame traditionnel (et ni aussi froid, du coup), et d’autre part certaines règles spéciales des unités ou objets permettront sans aucun doute de limiter cet aspect. Chaque joueur sera libre alors, lors de la construction de son armée, d’investir dedans au détriment d’un autre facteur.

Cette nouvelle édition de Warhammer ne tient pour autant pas toutes ses promesses. Les nouveaux joueurs, du moins ceux n’ayant pas encore investi dans un livre de règles, y trouveront plus que leur compte, entre la qualité de l’ouvrage et sa masse d’informations. La mise à jour des règles, somme toute légère, sera en revanche un argument un peu faible pour les anciens joueurs. Encore que réinvestir au bout de plusieurs années d’utilisation de la précédente édition ne soit pas très contraignant pour une aussi belle édition. On est fan ou on ne l’est pas…