Résumé :

Ancienne infirmière de guerre, la trentaine, Tracy Morgan, est troublée par la visite onirique d’un éléphant.

Un rêve qui va se révéler prémonitoire, lorsqu’ après la mort d’un pachyderme fou et un accident mortel dans la savane, le tour operator qui les emploie elle et  son compagnon, Russel Swanson, pour organiser des safaris au Kenya, les congédie.

Condamnés à la ruine, ils sont alors contactés par l’avocat représentant d’une compagnie d’aviation et d’Adriana Hofcraft.

Ce dernier propose de les  engager pour retrouver son père disparu dans la jungle congolaise alors qu’il essayait un de ces prototypes furtifs.

Au moment du crash, Edmund Hofcraft avait entamé des recherches, une quête pour le moins incroyable qui trouve son origine dans les recoins sombres de la Seconde Guerre mondiale…

Notre avis :

Pour son dernier roman, publié directement au format poche aux éditions du Masque, Serge Brussolo s’inspire de la mythologie grecque et des portes par lesquels les rêves du monde souterrain, autrement dit l’Erèbe, la région la plus proche de la surface des Enfers, où les frères Hypnos (le sommeil) et  Thanatos  (la mort) séjournaient, montaient vers les hommes.

Les connaisseurs de cet incroyable et prolifique auteur français, dont on ne parle pas assez du génie, s’en doutent, la référence n’est pas anodine  : la porte d’ivoire est celle des fantasmes, des rêves mensongers.

Conscient de la capacité de « l’homme » à bâtir d’incroyables intrigues remplies d’angoisse viscérale et de rebondissements frénétiques, de  l’excellence de ses écrits les plus récents (  Les Geôliers  ou bien Tambours de guerre  ), et surtout du plaisir mémorable éprouvé à en découvrir de plus anciens (Le carnaval de fer, Les lutteurs immobiles, Les bêtes), chez nombre d’éditeurs différents (Gallimard, Plon, Bragelonne) et dans tous les genres (Thriller, Science-fiction, Jeunesse, BD) débuter un Brussolo, c’est comme partir à l’Aventure  !

Ce nouveau livre a justement obtenu le Prix du roman d’aventures (la seconde fois pour l’écrivain après Le Chien de minuit en 1994), c’est pour dire  !

Une histoire totalement inédite (Serge Brussolo revoit et corrige ses romans, allant jusqu’à les faire rentrer dans un autre genre avec un savoir-faire incontestable  : Les Fœtus d’acier devenu La Mélancolie des sirènes par trente mètres de fond par exemple) qui nous amène à la découverte aux plus profonds de la jungle, là où tout est possible, où peuvent se dissimuler les plus grands dangers.

Tracy Morgan va se révéler une  héroïne «  brussolienne  ».

A la fois forte et fragile, elle va faire face à ses pires cauchemars, jusqu’à éprouver les prémices de la folie.

Le lecteur ne sera pas en reste lui aussi évolue au cœur de l’intrigue aux prises avec de sempiternelles interrogations  : réalité  ? Paranoïa collective  ? Que va-t-on découvrir à la fin du chemin  ? L’incarnation du mal  ?

L’Afrique décrite par l’auteur est pleine de sauvagerie, et se révèle infiniment sanglante et cruelle. Des tribus indigènes aux sentinelles laissées par des fanatiques de la Seconde Guerre Mondiale (on repense à Bunker et Derelict), les traditions et le modernisme s’entrechoquent et se combattent tout du long ces 352 pages, qui se dévorent littéralement.

Le style de Serge Brussolo, comme le bon vin, s’est bonifié. Si on a pu lui reprocher de s’être laissé emporter dans des délires fiévreux par le passé, dans ses œuvres les plus anciennes (issues d’un temps où il publiait un roman tous les mois et demi), tel n’est plus le cas, il a trouvé le juste milieu, et c’est un vrai régal.

L’ancien directeur de collection quitte le Masque, mais reviendra bientôt.

Les éditions Bragelonne ont déjà annoncé une collection qui lui sera entièrement dédiée, La nuit des lions, le premier roman sortira en janvier 2019, et reprendra les personnages du Roi Squelette.

La fin d’une époque, La porte d’ivoire est une pièce d’orfèvrerie de l’œuvre de Serge Brussolo.