En mai dernier, à l’occasion du festival BD « le Rayon Vert » de Volkrange/Thionville, nous avons croisé Grégory Lê, jeune dessinateur plein de talent. Il nous a parlé de son premier album paru en version numérique chez WEBellipses et en version papier chez Spootnik Editions. Une démarche assez rare pour que Khimaira s’y intéresse !

Khimaira : Avant toute chose, peux-tu te présenter?
Grégory Lê : Je m’appelle Grégory Lê, je suis illustrateur/graphiste freelance depuis 2005.

K : Quel cursus as-tu suivi?
G.L : Après une année aux Beaux Arts où j’ai déchanté, je me suis dirigé vers la faculté d’arts plastiques, à la fin de ce cursus (4 ans), j’ai passé un DESS en image de synthèse à Strasbourg.

K : Comment as-tu eu envie de faire ce métier?
G.L : Dans mon souvenir, j’ai toujours dessiné. Pour moi, c’est tout d’abord devenu une passion, et cela me semblait naturel de me diriger sur cette voie, même si le chemin pour y parvenir n’était pas nettement tracé.

K : Peux-tu nous présenter ta série ? Comment est née cette série ? D’où t’es venu l’idée de mettre en scène ce genre d’aventure ?

G.L : « Jeanne Dark » est une aventure horrifico-fantastique mettant en scène un groupe de jeunes qui vont être confronté à la disparition d’un de leurs camarades de classe. Cette histoire se devait d’être ancrée dans la réalité avec des personnages auxquels on peut s’identifier et abordant des thèmes universels comme l’amitié, le deuil, le sacrifice, etc.

Dès le début, ma volonté était de présenter ces personnages et cette ambiance dans une « longue » exposition avant même que l’action ne commence vraiment. Par la suite, le récit se présente sous la forme d’une quête avec des indices, des fausses pistes et des retournements de situations.

Après quelques projets (héroïc-fantasy, science fiction…), je me suis lancé en solo dans l’écriture d’une histoire pour la mener à bien. Comme base de travail, je suis parti d’un jeu de mots : « Jeanne Dark », que j’avais inscrit sur le dessin d’une jeune gothique que j’avais réalisé quelques années plus tôt.

K : Quelles ont été tes influences pour cette série ?
G.L : Elles proviennent essentiellement du cinéma de genre et des séries télés : notamment les productions Amblin des années 80, comme les « Goonies » et « E.T » ou encore la série « Buffy ». Il y a aussi les films sur le thème de l’enfance tel que « Stand by me », « the Monster Squad », « Lost Boys », « the Craft », the faculty », « Harry Potter »… Ou encore les réalisations de Guillermo Del Toro (l’échine du diable, le labyrinthe de Pan) et d’Hayao Miyazaki (le voyage de Chihiro, le Château Ambulant). Je suis un fan inconditionnel de films d’horreur et de fantastique, depuis la vision de « The Thing » de John Carpenter à l’âge de 8 ans, et tout ces films ont nourris mes illustrations depuis.

K : Parle-nous du personnage principal
G.L : Jeanne est une jeune ado gothique au caractère bien trempé. Elle vit seule avec son père depuis que sa mère est morte dans d’obscures circonstances. Cette dernière était une sorcière et tout comme elle, Jeanne a hérité de pouvoirs. Mais sans professeur, la jeune apprentie a bien du mal à les maîtriser.

K : As-tu un personnage préféré ?
G.L : Hormis Jeanne bien sûr, c’est le personnage du vieux Jo’, qu’on découvre dans le premier tome. C’est un mélange entre Jo’ l’indien de « Tom Sayer » et Yupa Miralda de « Nausicaä de la vallée du vent », ce vieux bonhomme inquiétant aux intentions qui restent mystérieuses et un des seuls, avec Jeanne, à connaître la magie. Il prendra beaucoup plus d’importance par la suite, et sans « spoiler », il passera réellement à l’action et sera la réponse à des questions laissées en suspens jusque là.

K : Quelles sont tes influences graphiques ? Les auteurs qui t’ont influencé ?
G.L : Il y a  tout d’abord les comics, et plus particulièrement la série des « Strange », j’ai tout de suite accroché au style de John Byrne. J’aime beaucoup Humberto Ramos, Franck Cho (Liberty Meadows), Steven Gordon (la série animée X-Men Evolution), Adrian Alphona (Runaways) et Guy Davis (BPRD). Je reconnais être aussi influencé par le manga, et notamment par le travail de Taniguchi (Quartier lointain, un Zoo en Hiver) et de Miyazaki (les films des studios Ghibli).

K : Comment organises-tu ta journée de travail ?
G.L : Je procède par étape, je passe une journée sur le storyboard d’une partie de mon histoire, une autre journée à la mise en page et à l’encrage et enfin une autre journée à la mise en couleurs.

K : Combien de tomes prévus pour cette aventure ?
G.L : Pour le moment seulement 2 tomes sont prévus pour conclure cette aventure. Par la suite, il est tout à fait possible de poursuivre, car la fin du tome 2 dévoile d’autres pistes à explorer, comme par exemple les origines de la mère de Jeanne et de sa « famille », et j’aimerai dessiner une Jeanne un peu plus âgée.

K : Comment t’organises-tu sur cette série où tu es scénariste et dessinateur ?
G.L : La partie la plus délicate pour moi, c’est le scénario et les dialogues, car c’est une grande première pour moi, et je ne suis pas un spécialiste dans ce domaine. C’est certainement ce qui me prend le plus de temps avec le découpage.

K : As-tu été au bout de tes idées sur la série ? As-tu suivi depuis le début le plan que tu t’étais fixé ?
G.L : Oui, sur l’idée de la trame principale rien n’a sensiblement bougé. Après, comme ma BD paraît sous la forme d’épisodes, tous les 2 mois sur la plateforme de BD numériques « WEBellipses »  et que je devais livrer les épisodes en temps et en heure, je me suis donc débarrassé de certaines scènes.

K : Est-ce que la bande dessinée est ton activité principale ?
G.L : Non, je suis illustrateur/graphiste depuis 2005. Et la BD est une activité annexe prise sur mon temps libre.

K : Quelle est ta technique de dessin ? As-tu recours au papier et au crayon dans ton processus de création ?
G.L : La base de tout reste le dessin sur papier, tout d’abord le crayonné, par la suite j’encre. Pour finalement le scanner et traiter la couleur infographiquement.

K : Quel serait le projet de tes rêves que tu aimerais voir se concrétiser ?
G.L : Il y a deux projets que je rêve de réaliser et que j’ai en tête, ce sont deux bios où j’accentuerai le côté fantastique : celle d’H.P. Lovecraft et celle de Genghis Khan.

K : Qu’apprécies-tu le plus dans ce métier ? Le moins.
G.L : Le +, dans le métier d’illustrateur, c’est la diversité, je peux me retrouver à dessiner un storyboard d’un court-métrage d’horreur, des objets archéologiques, suivre une autopsie pour les besoins de dessins de prod, illustrer une pochette pour un groupe, une affiche, un livre, réaliser une mascotte, un logo, etc.

Le -, les gens qui ne comprennent pas qu’illustrateur, c’est un métier avant tout ! Et qui, sous prétexte que c’est ta passion, pensent que le travail que tu vas leur réaliser sera à moindre coût (pour ne pas dire dérisoire).

K : Quel regard portes-tu sur le monde de l’édition actuel ? Le métier de dessinateur ?
G.L : Je suis encore un amateur dans ce domaine pour en avoir une vision concrète.

K : Que penses-tu des livres numériques ?
G.L : Je ne peux qu’en avoir une opinion positive puisque « Jeanne Dark » est née dans l’ère du numérique et que les premiers lecteurs ont pu la lire avec l’application de Bds numériques « WEBellipses ».  Pour ma part, C’est un bon moyen de diffusion qui ne remplacera pas le papier, mais qui peut, comme dans mon cas, servir à une « pré-édition » classique !

K : Quels sont tes hobbies à part le dessin ?
G.L : Le cinéma de genre, la musique plus particulièrement le métal (dans toute sa diversité !).

K : Quel est ton dernier coup de cœur pour une bande dessinée ?
G.L : « Un Zoo en hiver » de Taniguchi.

K : Quel est ton dernier coup de cœur pour un livre ?
G.L : « Tokyo » de Mo Hayder

K : Quel est ton dernier coup de cœur pour un film ?
G.L : « Prometheus «  de Ridley Scott

K : La question que je n’ai pas posé ?
G.L :
Un autre projet de Bd après « Jeanne Dark » ? J’ai été contacté par une jeune scénariste pour un projet sur le thème des Super-Héros vu sous un angle très réaliste. J’ai adoré le scénario et la note d’intention m’a mis l’eau à la bouche. Pour le moment, elle m’a envoyée pas mal de références visuelles, et après « Jeanne » qui devrait se terminer d’ici peu, je commencerai à faire mes premières recherches.

K : Merci pour le temps passé avec nous.
G.L : Merci à Khimaira pour cet entretien!

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