Dunwich est le second supplément de la série des Terres de Lovecraft, consacrée à cette portion de la Nouvelle Angleterre imaginée par le maitre de Providence.

Il reprend le formalisme de son prédécesseur consacré à Arkham. Une fois les généralités passées, les différentes parties de la ville et de ses alentours sont abordés sous une forme très encyclopédique, à raison d’un paragraphe numéroté par lieu, avant de laisser la place à quelques scénarios.

Dunwich présente cependant une différence majeure avec Arkham. Là où cette dernière est une ville de plusieurs dizaines de milliers d’habitants, Dunwich ne compte que quelques centaines d’âmes au plus. Ce supplément n’en présente donc pas un échantillon mais la quasi-intégralité !

Dunwich est par ailleurs un endroit dont l’isolement et les origines païennes ont favorisé l’émergence de croyances impies et de pratiques dégénératives. Inceste, consanguinité et violence familiale sont le lot de ses habitants depuis plusieurs générations. Impossible dès lors pour les PJ de démêler une intrigue au clair sans tirer en même temps sur un imposant sac de nœuds, que ceux-ci entretiennent des liens directs, indirects ou aucun lien entre eux.

Ce supplément constitue donc un cadre ouvert d’aventures dans lequel les personnages-joueurs pourront évoluer assez librement. Les scénarios qui accompagnent l’ouvrage vont d’ailleurs entièrement dans ce sens. Pour commencer, ils sont largement moins volumineux que d’habitude – une quinzaine de pages sur 176, alors qu’ils atteignent fréquemment 50% dans les autres suppléments de la gamme. Le premier, qui fait office de suite à la nouvelle L’Abomination de Dunwich (présente dans l’ouvrage), se présente comme le fil conducteur d’une campagne dans la région plus qu’une aventure à proprement parler. Le second est une simple mini-intrigue à insérer librement dans un scénario en cours. Elle n’est guère différente de celles offertes dans la partie encyclopédique de l’ouvrage, mais détaillée sur quelques pages au lieu d’un paragraphe.

Cette orientation bien particulière impose plusieurs difficultés au MJ. La première sera de s’y retrouver dans la multitude de drames qui secouent la région. L’organisation claire de l’ouvrage, la présence d’un index complet et les nombreux renvois entre les différentes entrées facilitent grandement la tâche de ce côté, même si une bonne préparation en amont reste indispensable.

La seconde difficulté tient justement au nombre d’intrigues rapporté à la faible taille du village. Un mystère se cache dans chaque maison, dans chaque famille, qui, lorsqu’elle n’est pas touchée par le Mythe, a vécu une forme ou une autre d’inceste. Présenter cet environnement de manière crédible est un challenge d’autant plus difficile que la réputation de Dunwich n’est plus à faire auprès des lecteurs de Lovecraft un tant soit peu avertis. Il ne faudra donc pas compter sur l’effet de surprise en emmenant vos PJ dans le coin…

Dunwich est donc un supplément difficile d’accès qui nécessite un MJ méthodique et besogneux. Mais c’est un mal nécessaire, la contrepartie de sa force majeure : son orientation « cadre ouvert » inhabituelle au sein d’un jeu dont le déroulement est habituellement largement dicté par l’histoire à raconter. Cette vraie nouveauté, sa complémentarité avec le supplément sur Arkham – les PJ ont toutes les chances de faire des allers retours entre les deux, surtout s’ils sont missionnés par l’université – et son formalisme bien pensé en font sans aucun doute un atout indéniable pour la gamme.