Forte de son succès, la musique celtique ne reste pas cantonnée dans le registre traditionnel et se mêle à d’autres genres allègrement. Ses rapports avec la musique orchestrale ne sont pas nouveaux, et ont donné naissance à un genre particulier déjà appelé « celtique symphonique » par certains critiques.

Alan Stivell est connu pour sa Symphonie Celtique, sous-titrée Tir nanOg, en 1979, mais elle allait au-delà du mélange musique traditionnelle celte/classique, puisqu’elle incorporait également des éléments pop, jazz-rock et autres. Elle a été jouée au festival interceltique de Lorient en 1980, le tremplin d’autres grandes productions similaires.

En effet, Shaun Davey a présenté à ce même festival plusieurs de ses œuvres. Il s’est spécialisé dans le genre celtique orchestral dès 1983 avec The Brendan Voyage, un véritable concerto pour orchestre et Uilleann-pipe, avec le virtuose Liam O’Flynn. Et c’est en 1984 que Shaun Davey présente à Lorient The Pilgrim, un voyage à travers les différents pays celtes où l’orchestre sert de fil directeur, puis en 1985 Granuaile qui incorpore plus de chant. Il a aussi composé The Relief of Derry Symphony, en 1990, qui est conforme à une symphonie classique avec ses quatre mouvements, hormis le fait qu’elle intègre des cornemuses écossaises et irlandaises.

Lui aussi remarqué à Lorient, le pianiste Didier Squiban est l’auteur de la Symphonie Bretagne et de la Symphonie Iroise, deux compositions “classico-celtiques” puissamment évocatrices.

Mike Oldfield, au détour de Voyager, un album celtique assez soporifique, a néanmoins trouvé son inspiration coutumière grâce à une heureuse envolée pour orchestre et instruments irlandais intitulée Mont-Saint-Michel.

Bill Whelan s’est fait connaître en signant les arrangements irlandais de chansons de Kate Bush, puis par la musique du show Riverdance. Il a récemment sorti The Connemara Suite, une composition pour orchestre de chambre qui développe des thèmes irlandais traditionnels. Il livre donc là un travail très « classique », comme de nombreux et illustres compositeurs avant lui, en s’inspirant de mélodies folkloriques.

Se prêtant volontiers à différentes expériences musicales, les Chieftains s’étaient déjà alliés à un orchestre en 1982 pour la musique d’une série télévisée: The Year of the French, et l’ont refait à plusieurs reprises, notamment avec le flûtiste classique James Galway. Et ils viennent de participer à la musique du film The Water Horse; Legend of the Deep, composée par James Newton Howard, où instruments et thèmes irlandais sont ingénieusement mêlés.

Du côté des musiques de film, genre propice aux mélanges, l’utilisation des musiques traditionnelles relève souvent de légers emprunts pour des œuvres principalement orchestrales. Mais certains compositeurs les intègrent pour en faire bien plus qu’une simple touche celtique.

À cet égard, on soulignera certaines compositions de James Horner. D’abord pour le film Braveheart, qui réserve une place d’honneur à la cornemuse… irlandaise! En effet, bien que l’action du film se déroule en Écosse, le compositeur a préféré cet instrument, beaucoup plus polyvalent face à l’orchestre. Et il a renouvelé l’expérience pour de nombreux morceaux de la bande originale de Titanic.

Tamira Terashima, un compositeur jusqu’alors pas très renommé, a été choisi pour composer la musique du film animé Gedo Senki. Son utilisation de l’orchestre et des chœurs suit les canons du genre, et il a eu l’excellente idée de s’adjoindre l’aide du célèbre et talentueux musicien galicien Carlos Nuñez. Les cornemuses et flûtes de ce dernier, portées par l’orchestre, forment des thèmes riches et colorés, qui vont bien au-delà d’un simple parfum celtique, et apportent une flamboyance quasi magique.

Ce petit historique non exhaustif nous montre donc que nous avons affaire à un mélange de genres qui est loin d’être de circonstance ou anecdotique, et dont on suivra les prochaines évolutions et réalisations avec attention.