Lorsqu’il évoque la première époque de Métal Hurlant (entre 1975 et 1987), Philippe Druillet reconnaît volontiers que la revue « était bien plus qu’un magazine de bande dessinée ». Pour l’auteur de La Nuit et de Salammbô, « Métal Hurlant symbolisait un combat culturel », créé à une époque où la BD était encore regardée de haut et les publications destinées en majeure partie à la jeunesse. Il dit tout cela et bien d’autres choses dans le long entretien qu’il a accordé à Jerry Frissen et Christophe Quillien, à lire dans le nouveau Métal Hurlant, titre aujourd’hui réinventé sous la forme d’un beau mook trimestriel de près de 300 pages.

Pas de linceul pour Billy Brakko de Marc Caro

L’équipe rédactionnelle d’aujourd’hui a choisi d’alterner les numéros de création originale et les numéros d’anthologie, comme celui-ci. Au sommaire, sur le thème « L’Homme est bien petit », on trouve une collection de réédition de planches, parues à l’origine dans Métal au tournant des années 1970-80 et toutes accompagnées d’une page d’analyse rétrospective (signée par Claude Ecken ou Christophe Quillien). En quatrième de couv, la liste des auteurs n’est pas qu’un générique, c’est un best-of : Druillet, donc (en interview mais aussi dans les pages BD avec Vuzz, à la fois récit de SF et manifeste existentialiste radical), Frank Margerin (dont le style, dans La Conquête de Pluton, est encore très différent de ce qu’il sera dans ses œuvres futures, comme Radio Lucien, mais on rigole tout autant), Marc Caro (Pas de linceul pour Billy Brakko, réalisé sur carte à gratter, impressionnant), Enki Bilal et Jean-Pierre Dionnet (respectivement au dessin et au scénario du mythique Exterminateur 17, dont on peut lire ici les 13 premières pages, œuvre séminale qui a autant marqué Ridley Scott que Michael Mann ou Katsuhiro Otomo — c’est ce que les intéressés eux-mêmes ont déclaré)…

Retour à la nature de Jean-Claude Mézières

La liste ne s’arrête pas là (il y a en tout 23 bandes dessinées, pas seulement françaises au demeurant), mais inutile de la prolonger dans cet article. Précisons quand même que si le rêve, le voyage, l’aventure et l’évasion sont au programme, on est plus d’une fois troublé par la justesse des prospectives imaginées par les auteurs de science-fiction, lorsqu’ils nous donnent à contempler des avenirs dystopiques qui, à plus d’un titre, trouvent un écho angoissant dans notre quotidien de 2022 (et a posteriori, la liberté de ton, d’invention, l’insolence créative d’une multitude de cases éclairent aussi d’une triste lumière les tons fades de notre société actuelle, déculturée et normée). Des expériences à vivre au détour des pages de ce numéro 4, où plein d’autres choses encore sont à apprendre et à découvrir. Rendez-vous dès mercredi 24 août en kiosque et en librairie.

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