Si Neil Armstrong n’avait pas fait un bond de géant pour l’humanité mais deux, il aurait foulé la face cachée de la lune et serait tombé sur… une colonie nazie installée là depuis la chute du IIIème Reich ! Menée à la cravache par un néo-Fürher cacochyme (Udo Kier, ja !), la peuplade s’abrite dans un gigantesque bunker en forme de croix gammée et attend que le Herr Doktor Richter, savant fou de son état, mette la dernière main au Götterdämmerung, vaisseau-amiral qui permettra à tous de faire un retour triomphal sur Terre au son du canon ! 

L’équipe d’Iron Sky n’a pas inventé cette théorie débile selon laquelle des Allemands portant l’uniforme auraient fui la défaite de 1945 à bord d’engins spatiaux. Des ufologues fantaisistes envisagent cette possibilité, imaginant que le complexe militaro-industriel allemand, dans les années 1930-40, aurait développé une série d’aéronefs permettant de se déplacer à des vitesses et des altitudes jamais atteintes. D’autres allumés pencheraient plutôt pour une collaboration des Nazis avec des extraterrestres pourvoyeurs de haute technologie, et une autre hypothèse, nettement plus raisonnable, avance que des soldats de la Wehrmacht auraient filé en Antarctique où ils vivraient encore, planqués dans une base souterraine.

Le réalisateur finlandais Timo Vuorensola et ses scénaristes ont puisé dans ces conjectures farfelues pour échafauder une sorte de Docteur Folamour façon nazixploitation : découverts en 2018 par une mission spatiale américaine, les Schleus de la lune décident de mettre un coup de boost à leurs projets d’invasion. Grâce à la technologie d’un smartphone confisqué à l’astronaute Washington (un Noir, mein Gott !), ils peuvent d’un coup rendre opérationnels leur immense navire de guerre et sa flotte de combat. Un gradé à la mâchoire carrée, Klaus Adler, se porte volontaire pour s’aventurer sur Terre et rapporter d’autres smartphones. Après diverses péripéties, l’officier déboule dans le bureau ovale de la Maison blanche où il tombe sur… Sarah Palin, en campagne pour sa réélection ! La présidente républicaine est une conne arriviste et belliqueuse, et ça tombe bien, car Klaus Adler aussi ! Séduit par les moyens modernes de communication et de propagande dont abuse la Première Dame, le Boche s’imagine Führer à la place du Führer tandis que sa fiancée Renate, beaucoup plus futée, découvre sur Terre les vertus de l’humanisme et de la démocratie…

Inutile de chercher dans Iron Sky des considérations critiques sérieuses sur le fascisme en tant qu’appareil idéologique. Pour un tel film de genre, les nazis font office de méchants parfaits aux mauvaises intentions évidentes, gueulant des « Heil Hitler !» à tout bout de champ. Dotée d’une intrigue qui se déroule en bonne partie aux États-Unis, la pochade de Timo Vuorensola s’affirme avant tout comme une charge d’éléphant contre le parti républicain et la politique-spectacle américaine (le nom de la présidente des USA n’est jamais mentionné, mais il faudrait être sourd et aveugle — ou débarquer de la lune — pour ne pas comprendre de qui il s’agit). Pourquoi une telle prise de position de la part d’un cinéaste scandinave ? Mystère et boule de gomme. En tout cas, Vuorensola s’amuse comme un petit fou et réussit des scènes très drôles dans la base des Allemands (au passage, les décors sont superbes). Le final dans l’espace — une bataille opposant forces terrestres et lunaires — n’est pas mal non plus, avec des effets spéciaux sacrément efficaces pour une si petite production (6 millions d’euros à peine !). En revanche, les séquences sur le plancher des vaches s’avèrent moins convaincantes, par la faute d’un humour satirique qui pèse souvent des tonnes et ne fait pas honneur au casting, très inspiré, avec naturellement des acteurs germaniques à l’affiche. Il y a Udo Kier, donc, qui s’éclate dans un rôle — trop bref — de simili-Hitler (le comédien natif de Cologne était déjà apparu en uniforme noir dans la fausse bande annonce « grindhouse » Werefolf Women of the SS de Rob Zombie). Le rôle de l’abruti mégalo Klaus Adler est tenu par Götz Otto, vu dans Demain ne meurt jamais, médiocre Bond de l’ère Brosnan, et bientôt dans le prochain Astérix (eh oui !). Last but not least, Iron Sky met en vedette Julia Dietze, alias Renate, institutrice chargée d’inculquer la doctrine nazie aux têtes blondes de la base lunaire. Dietze est rigolote et sexy, elle a du tempérament. Un rôle qui, avec un peu de chance, pourrait lui valoir d’échapper aux petits rôles de séries télé allemandes auxquels elle est abonnée.

Pour l’anecdote, Iron Sky a été financé de manière totalement indépendante, et les auteurs sont allés piocher à droite à gauche les fonds nécessaires pour tourner (le film est officiellement une coproduction entre la Finlande, l’Allemagne et l’Australie). Le budget a même pu être bouclé grâce à un appel aux internautes voulant soutenir le projet. Les donateurs des centaines de milliers d’euros récoltés ont leur nom crédité au générique de fin. La communauté Iron Sky a ses quartiers sur Facebook, où on peut se tenir au courant des apparitions de l’équipe dans divers festivals et conventions autour du globe. Pour les dates de sorties, rendez-vous sur le site officiel, où vous pourrez pétitionner pour qu’Iron Sky soit distribué dans un cinéma près de chez vous ! Le film est sorti un peu partout en Europe ce printemps, mais à ce jour, rien n’est prévu pour la France. Ach, Teufel !

Ci-dessous, la bande annonce concoctée pour la première mondiale du film, qui a eu lieu en février 2012 à… Berlin, bien entendu ! Iron Sky y a été projeté dans le cadre du 63ème Festival international du Film.

En bonus, le clip Under The Iron Sky de Laibach. Le groupe slovène a signé la bande originale du film.