Sous une couverture que les lecteurs entomophobes n’oseront peut-être pas prendre en main se trouve le nouveau roman de Michaël Moslonka parut aux Editions Faute de frappe et titré La mélodie du malheur.

Un couple traverse tranquillement en voiture le hameau baptisé Les Trois Epis, dans le Haut-Rhin, puis s’y installe, au grand étonnement de leur fille Marina. Cette dernière, surdouée, se range à la décision de ses parents et fait de son mieux pour apprécier sa nouvelle existence tout en profitant des vacances.

Au bout d’un moment, ne pouvant rester longtemps à l’intérieur, elle croise un certain Lucien, un garçon à peine plus âgé qu’elle, et, semble-t-il, sans doute le seul préadolescent du village. Pour Marina, habituée d’être la risée des autres enfants du fait de sa maturité de surdouée, ledit Lucien devient vite un bon camarade. Il est plutôt drôle et ne se moque jamais d’elle, même si, parfois, ses paroles sont un peu étranges.

En dehors de lui, Marina n’a que peu de contacts. Les Trois Epis sont bien beaux mais d’un calme pesant, presque angoissant. Preuve en est, les deux voisins les plus proches : une femme blonde qui semble passer sa vie à bronzer nue dans son jardin et un certain Virgile toujours occupé à préparer un barbecue. Sauf que ladite blonde souhaite noyer la fillette qui fait trop de bruit et que le dénommé Virgile semble en savoir bien plus qu’il ne le dit.

Tout ceci dérange Marina, lui provoque des cauchemars, tout en la rendant paranoïaque. L’escalade suivante est de constater que ses parents ne cessent de se disputer, eux qui, avant d’arriver aux Trois Epis semblaient un couple uni. Puis l’horreur monte d’un niveau lorsque la fillette croit déranger trois meurtriers en pleine action et que ceux-ci se retournent vers elle…

Comme c’est souvent le cas dans les textes de Michaël Moslonka (relisez L’autoroute publié chez le même éditeur et chroniqué sur ce site), dès le début, l’histoire vous attrape et ne cesse de vous malmener jusqu’aux dernières pages. Il faut, en effet, accepter de lire en se creusant les méninges pour imaginer ce qui se trame réellement dans le récit, noter les indices, échafauder des hypothèses, jusqu’au grand final qui confirme ou infirme les théories élaborées. La mélodie du malheur est ainsi écrite et vous risquez bien d’être surpris.

Pour les fans de cet auteur, sachez que La mélodie du malheur est la version « longue » d’un texte précédemment publié dans l’anthologie Mystères et mauvais genres chez Sombres Rets en 2010. Dans l’édition présente, l’histoire retrouve l’intégralité de ses rebondissements « coupés au montage » dans sa version précédente. Ceci permet de passer plus de temps dans cet étrange hameau où se déroulent de biens étranges choses…

Quant au véritable hameau nommé Les Trois Epis, ne craigniez rien en venant le visiter, il n’est pas aussi menaçant que dans ce texte sombre à souhait.

Pour résumer, La mélodie du malheur est un court roman dans lequel on s’enfonce à la manière de sables mouvants tant est intense la curiosité du lecteur d’en connaître la fin. Une ambiance juste assez glauque, sous des apparences de normalité, pour titiller l’esprit ; du fantastique, un peu d’horreur et des passages « sur le fil du rasoir », bref, de quoi passer un très bon moment de lecture.