Sous un baobab, un vieil homme raconte aux enfants qui l’entourent, une histoire : celle de l’amitié indéfectible entre Maki, un enfant de 10 ans, et Zarafa, une girafe orpheline, cadeau du Pacha d’Egypte au Roi de France Charles X.
Hassan, prince du désert, est chargé par le Pacha de conduire Zarafa jusqu’en France mais Maki, bien décidé à tout faire pour contrarier cette mission et ramener la girafe sur sa terre natale, va les suivre au péril de sa vie.
Au cours de ce long périple qui les mènera du Soudan à Paris, en passant par Alexandrie, Marseille et les Alpes enneigées, ils vont vivre mille péripéties et croiser la route de l’aéronaute Malaterre, des étranges vaches Mounh et Sounh et de la pirate Bouboulina…

Un conte historique
Zarafa raconte l’histoire de la première girafe introduite en France dans le Jardin des Plantes, cadeau du Pacha d’Egypte au roi Charles X. Un travail énorme de documentations est fourni aussi bien au niveau des décors que de la « girafomania » qui régnait à l’époque.

Le scénario est dans l’ensemble un peu branlant, car les deux réalisateurs ont voulu intégrer trop de choses à l’histoire. Le problème majeur reste tout de même les motivations de Maki. L’enfant va rencontrer par un pur hasard Zarafa la girafe et promettre à la mère de cette dernière de la ramener dans son Afrique natale. Aucun lien n’est installé entre l’enfant et l’animal qui bien sûr très rapidement se prend d’affection pour le jeune Maki. La situation initiale aurait pu être plus développée en retirant notamment les pirates et Bouboulina.

Certes Bouboulina, servie par l’étrange voix suave de l’actrice Ronit Elkabetz, est rigolote, mais elle ne sert pas l’intrigue et reste un prétexte pour séparer pendant un court moment Hassan et Maki.

Maki justement, notre petit héros courageux et volontaire, est parfaitement travaillé. Il est dynamique et touchant; un personnage fort qui plaira aux enfants. Le jeune Max Renaudin double à merveille le personnage et réussit à faire passer toutes les émotions souhaitées.

Le personnage le plus charismatique du film est Hassan, le bédouin solitaire au service du Pacha. C’est un homme sage, cultivé et respectueux, révolté par l’arrivée des esclavagistes en Afrique. Il reconnaît vite la valeur de Maki même si l’enfant se met en travers de son chemin et rend bien plus périlleuse sa mission. Hassan est celui qui va évoluer le plus tout au long de l’intrigue et parfois on se demande qui est vraiment le héros de l’histoire…

Moreno, l’esclavagiste prêt à tout pour récupérer Maki qui lui a échappé, est un méchant caricatural et peu complexe, contrairement à ce que prétend Rémi Bezançon: « il n’a rien à voir avec les vilains habituels des films d’animation ». Au contraire! Pour moi, c’est un antagoniste cliché qu’on a déjà vu des dizaines de fois et le fait qu’il soit martyrisé par sa femme n’étoffe en rien ce personnage!

Zarafa la girafe, se prend d’amitié pour Maki. Entre eux deux, une vraie relation naît plus que celle d’un maître et son chien (ou son chat). Maki la considère comme un animal sauvage et donc non domptable. Quant à Zarafa, elle ressent le respect de Maki.

Ainsi, à travers cette relation, les auteurs développent l’enfermement des animaux dans les zoos, mais aussi l’écologie et le respect de la nature. Le film « enseigne » de façon juste le respect que les enfants doivent avoir pour les animaux exotiques. Nous ne pouvons pas traiter une girafe, un hippopotame ou un chameau comme un animal de compagnie ou de cirque!

Le voyage en ballon (au lieu du bateau) donne une dimension très poétique au film; presque fantastique et nous permet ainsi de découvrir les villes visitées aussi bien sur terre que vues du ciel. Un choix assez intelligent apportant une touche d’originalité à la vraie histoire de Zarafa!

Pour Bezançon, le thème principal abordé est la liberté. Je ne l’ai pas ressenti ainsi. Il s’agit plutôt de la force de l’amitié. Amitié entre Maki et Zarafa, entre Maki et Hassan, entre Hassan et Malatère, entre Hassan et le pacha, entre Maki et Bouboulina… Les auteurs nous montrent avec brio que l’amitié peut régler les conflits ou dépassent les barrières sociales. La recherche du père (incarnée par Hassan) est bien trop survolée et on sera déçu par le manque de profondeur dans la relation Maki/Hassan.

Au niveau du choix des acteurs, Rémi Bezançon a préféré « choisir des acteurs de théâtre plutôt que de cinéma ». Et bien ce choix n’est pas judicieux et cela se ressent dans la prononciation des répliques. Un film d’animation doit être joué, comme pour un film live, par de vrais acteurs de cinéma, car la dimension théâtrale donne un ton trop ampoulé aux personnages. Ainsi Thierry Frémont qui joue Moreno est insupportable ou encore l’acteur doublant Charles X qui manque cruellement de naturel. Il y a un côté trop « adulte » dans les doublages parfois pas assez fun.

Un autre point très décevant dans le scénario: l’humanisation trop poussée des animaux. Ainsi, les vaches jumelles ressentent des émotions (parce qu’elles sont jumelles) ce qui ne fonctionne pas du tout: ce sont des animaux et non des humains et la beauté du film réside justement dans la réunion homme/animal; pas la peine donc de montrer des vaches comme des jumelles humaines. De plus, Zarafa parle à Maki avec sa voix intérieure à la fin du film. Très mauvais choix! Cela coupe toute l’émotion. De plus la réplique de la girafe est brouillonne et trop explicative. La voix de Déborah François ne fonctionne pas du tout. Enfin, les animaux pleurent dans le film ce qui est loin d’être crédible et casse à chaque fois la tristesse de la scène.

La musique est magnifique et évolue au fur et à mesure du voyage en ballon. La chanson du générique de fin est entraînante et restera certainement dans la tête des jeunes spectateurs. Le clin d’œil à Kirikou est à noter indubitablement!

Un voyage d’images!
Ce qu’on ne pourra pas reprocher du tout au film c’est sa superbe animation aux décors impressionnants et aux sublimes couleurs.

On notera cependant une confusion de style. Les deux réalisateurs mélangent ambiance Ocelot (car la référence est sans équivoque, même si Bezançon et Lie se réfèrent à Miyazaki; référence non justifiée…) et esprit Chaumet (Lie ayant travaillé avec lui). Ainsi une ou deux fois, on se retrouve avec deux styles totalement différents qui malheureusement ne s’assemblent pas du tout, notamment pendant les scènes avec le Roi où la différence est trop appuyée.

L’ensemble du film reste visuellement impeccable avec une ambiance à la Azur et Asmar qui m’a tout de suite frappée.

Le travail sur les différentes ambiances (Sud/Nord) est remarquable et les séquences transportent le spectateur d’abord dans un univers chaleureux et coloré avant de tomber dans un monde morne, froid et violent.

Yoshimi Tamura est le directeur de l’animation sur ce film. Quand on sait que le bonhomme a travaillé pour Disney puis Dreamworks et a récemment animé Tiana dans La Princesse et la grenouille, on est forcé de reconnaître que le film ne pouvait pas être autrement que visuellement abouti!

CONCLUSION
Zarafa est un joli film d’animation français qui prouve une nouvelle fois que nous avons de très bons « travailleurs » dans ce secteur. Malgré un scénario pas toujours au top, l’histoire est touchante et l’animation 2D une vraie merveille. Un film qui plaira aux enfants, mais aussi aux grands. Une autre qualité du film réside ainsi dans la double lecture de l’histoire; certaines choses échappant aux plus jeunes.

A découvrir le 8 février!