Le futur proche. Les villes sont devenues des mégapoles dont la taille et la densité de population ont nécessité le développement d’un gigantesque réseau sous-terrain de canalisations et de retraitement des eaux usées. Un réseau dont la taille est telle que les secteurs les plus anciens ne sont plus connus de personne. Ce milieu est favorable aux pillages, aux laissés pour compte mais aussi aux créatures étranges et surdimensionnées. Une unité spéciale des forces de l’ordre, la Sewer Police, veille heureusement au grain…

Prolifique n’est même plus assez fort pour Christophe Bec, qui démarre une nouvelle série avec Under. Et oui, encore "sous"! Plus sous la mer cette fois mais sous la ville, encore que l’élément aquatique joue toujours un rôle de premier plan – sous la forme d’un bien moins attirant réseau d’égouts. Ce n’est pas la seule thématique récurrente de Bec que l’on retrouve ici, puisque la zoologie, déjà au cœur de Carthago, constitue là encore un élément central de l’histoire.

Si les thèmes sont connus, c’est dans le genre que Bec se renouvelle, un construction de carrière surprenante et passionnante à la fois dans un milieu où, aux yeux du public, la première appartenance d’un artiste est souvent celle du genre (untel en fantaisie, untel en SF…). En l’occurrence, Bec revendique ici la double influence des films de série Z et autres slashers – les créatures qui rôdent – et du polar noir – son personnage principal, anti-héro abimé par une expérience douloureuse.

Le résultat, globalement convainquant, surprend cependant par son ampleur. L’univers déployé contient en effet toutes les promesses d’une longue série, alors qu’il s’agit d’un diptyque. D’un côté, ce format fait du bien à une époque proposant trop de séries à rallonge, de l’autre le sentiment que l’expérience devrait se prolonger pour pleinement tirer partie de l’univers est tenace. Le lecteur n’est jamais content, le critique encore moins, mais Bec s’en fout et il a bien raison: il peut ainsi continuer à explorer ses thématiques fétiches et donner le meilleur de son art.