Il avait pourtant juré en 2000 qu’on ne l’y reprendrait plus et pourtant… Le maître Wes Craven (La Colline a des yeux, Le Sous-sol de la peur) nous revient avec le dernier volet (peut-être pas l’ultime, qui sait !) de sa saga Scream, commencée il y a tout juste quinze ans.

Quelques années plus tard, le réalisateur évoquait la possibilité d’écrire un nouvel opus à son œuvre phare, qui l’aura fait connaitre à une nouvelle génération de cinéphiles toujours plus demandeurs de frissons, à la condition que son travail soit à la hauteur de l’épisode à l’origine de la série.

C’est donc dans cette optique que tonton Craven nous plonge dix ans après les premiers meurtres commis par Ghostface à Woodsboro.

Sidney Prescott (Neve Campbell) est parvenue à tourner la page mais c’est tout de même avec appréhension qu’elle retourne dans sa ville natale pour le lancement de son premier roman. C’est à ce moment précis, où la ville commémore les événements morbides, que le tueur au masque blanc décide de pointer le bout de sa lame pour décimer l’entourage de notre héroïne et de ses amis retrouvés : le sherif Dewey Riley (David Arquette) et sa femme, l’ancienne journaliste Gayle Weathers (Courtney Cox).

Le moins que l’on puisse dire c’est que la tâche était ardue. Après un troisième film plutôt faible sur tous les plans, le réalisateur de La Dernière Maison sur la gauche (1972) se devait de se renouveler pour ne pas tomber dans la catégorie des réalisateurs qui épuisent leur franchise jusqu’à la faire mourir de sa belle mort. Dans ce cas précis, les premières minutes font peur… très peur. On a l’impression de tomber dans la resucée d’un concept vraiment usé. Heureusement, une chute arrive assez vite et nous transporte finalement dans une parodie plutôt intelligente qui fait passer le spectateur dans du second degré (ce qui n’est pas sans rappeler le deuxième volet d’Urban legend). Malheureusement, Craven s’enlise un peu dans ce concept qui finit par ne plus surprendre le spectateur à la longue. En tous les cas, c’est à cette occasion que l’on peut découvrir en profondeur la réflexion du réalisateur entamée au début de Scream 2 sur le slasher, ce qui lui donne ensuite toute latitude pour décortiquer le genre en renouvelant un petit peu (trop peu, dites-vous ?) ses références en la matière. On remarquera, d’ailleurs qu’il oublie complètement de citer le premier slasher assumé de l’histoire du cinéma Black Christmas de Bob Clark (un film canadien de 1974 qui aujourd’hui encore n’a rien perdu de sa superbe).

Bref, sitôt passé ce purgatoire, un brin nombriliste (on ne compte plus les autocitations), nous voici plongé dans l’histoire avec les retrouvailles des héros qui ont fait le succès de la marque. Personne ou presque (sinon les morts des épisodes précédents) ne manque à l’appel. Ils ont tous vieilli mais c’est comme si on ne les avait jamais quittés. Le temps semble n’avoir eu aucune emprise sur les personnages (c’est presque à en oublier que Neve Campbell n’est plus une adolescente… elle a quand même 38 ans). Cette évolution qui aurait pu injecter du sang neuf dans le scénario passe à la trappe. Au final on se retrouve avec les mêmes techniques de mise en condition pour faire sursauter les spectateurs. De ce côté, c’est plutôt efficace (merci les monteurs), car on ne peut pas dire que le reste relève de l’originalité, bien au contraire. Craven a dépoussiéré ses vieux scénarii et les a fait joué par la toute jeune horde d’acteurs hollywoodiens : Emma roberts (qui campe ici la cousine germaine de Sidney, mais elle ne s’appelle pas Germaine puisqu’elle se prénomme Jill dans le film), Anna Paquin (Découverte dans La leçon de piano et Jane Eyre), Rory Culkin (qui n’est autre que le jeune frère du garnement de Maman, j’ai raté l’avion), Kristen Bell (Veronica Mars, Gossip Girl) et bien d’autres comédiens et comédiennes tout droit sortis des séries américaines à la mode.

Pour faire court, la trame dramatique reste inexorablement la même. Le réalisateur tente de faire passer cela sur le compte de l’ultra théorisation du genre commencée avec la dissection style FEMIS de La nuit des masques dans Scream, mais on s’aperçoit qu’au final, rien n’a vraiment changé : ce sont toujours les copines bimbos (blondes ou pas, munies de décolletés plongeants et convoitées sexuellement) qui font les frais de la lame affutée au départ, et, au final on se retrouve dans l’arrière boutique d’une boucherie façon Delicatessen (sans l’aspect esthétisant, ni le génie qui habite Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro pour les différents degrés de lecture d’une œuvre cinématographique). Les quelques rares variantes passent alors pour des traits d’humour. Mais, après tout, a-t-on vraiment besoin de comprendre comment un film de genre est construit pour frissonner au fond d’un fauteuil d’une salle obscure ?

Ce qui sauve ce film de la médiocrité est ce second degré largement alimenté par l’écriture des dialogues et le jeu des acteurs. Les répliques de la journaliste et romancière Gayle Weathers font toujours mouche. Chaque spectateur averti s’amusera également à retrouver ici ou là des clins d’œil volontaires ou fortuits du cinéaste aux autres auteurs comme Dario Argento, John Carpenter, Michael Powell, Alfred Hitchcock, Robert Rodriguez

Loin d’être raté, ce quatrième volet devrait permettre à chacun de trouver son intérêt : pour les plus jeunes, qui n’ont pas vu les premiers, de découvrir la marque Scream et, pour les plus aguerris, de dénicher les références et profiter d’une lecture au second degré somme toute humoristique.

Sortie sur les écrans français, ce jour, 13 avril (n’y voyez aucune référence fâcheuse… les films en France sortent bien le mercredi et non le vendredi comme dans beaucoup d’autres pays !)