Un individu reprend conscience au sein d’un tribunal. C’est son procès et il vient d’être condamné à l’infamie, la pire des situations dans cette société d’un avenir très lointain où l’on se sert plus de son fam – exomémoire et calculateur surpuissant – que de son propre cerveau. Une chose toutefois lui revient, son nom, Eron Osa. Il obtient, peu de temps après, le soutient d’un psychohistorien (ou psychialiste) – la caste la plus haute chargée de prédire l’avenir par les mathématiques – qui lui confie un bien aussi rare que précieux : un livre. Comment en est-il arrivé là, lui qui, né sur un monde très éloigné du cœur qu’est la planète Sublime Sagesse, a quitté son père à l’âge de 12ans pour être emmené par son précepteur étudier les mathématiques à proximité de Lointaine, éternelle rivale de Sublime Sagesse et berceau du Fondateur ?
 
Dans ce roman de hard science (quand même plutôt soft), on découvre en parallèle la jeunesse du protagonniste Eron Osa, pris dès ses 12ans dans une conspiration visant à ravir la psychohistoire aux psychialistes et, très ponctuellement, le Eron âgé, infame (c’est-à-dire privé de fam) qui tente de reprendre pied. Le roman n’échappe pas aux clichés du genre et certains passages pourront barber les allergiques des maths et des sciences. Mais c’est avant tout un roman intelligent et bien construit (même si l’on regrette le peu de pages consacrées au Eron après son procès, certainement à venir dans le tome II) où l’intrigue est rondement menée et les personnages, hauts en couleurs, solidement campés. Ces pages fleurent bon notamment La fin de l’Eternité de Asimov, auteur dont se réclame d’ailleurs Donald Kingsbury. Un avis globalement très favorable donc, un bon moment de lecture en perspective et quelques réflexions passionnantes (sur la postérité ou le déterminisme entre autres), mais que les détracteurs de Asimov ou de Van Vogt dénigreront certainement.