Oikouménè est un très bel exemple du chemin que peut prendre le milieu du jeu de rôle dans les prochaines années. Il s’agit en effet d’une coproduction entre les Ludopathes, qui joue ici le rôle de force créatrice, et Sans Détour, qui apporte son savoir faire d’éditeur pour la production de l’ouvrage en tant que tel. Cette combo permet à ce jeu, qui déjà connue une première édition au format électronique, le plaisir d’une édition papier. Les auteurs en ont profité pour corriger et améliorer la plupart des parties du jeu – campagne remaniée, simplification du système, correction des erreurs…

Oikouménè, qui signifie en grec "le monde connu", vous permet de (re)découvrir l’antiquité. Son livre de base se veut à ce titre plutôt générique, avec un système malléable et une présentation globale du monde méditerranéen. La présence d’un jeu historique sur Khimaira peut surprendre. Elle n’est pourtant pas incongrue, bien au contraire. Oikouménè adopte en effet le point de vue des habitants de l’époque pour qui les dieux sont présents en toutes choses et dans tous les événements. Le jeu propose ainsi un système de faveurs divines, qui correspond en fait grosso modo aux systèmes d’avantages des autres jeux ou encore un bestiaire imaginaire. Autant d’éléments fantastiques aux yeux des joueurs mais bien réels pour les personnages qu’ils incarnent.

L’époque retenue, aux alentours de 270 av. J.-C., est une période charnière où le monde romain est en pleine ascension mais n’a pas encore effacé le monde helléniste. Le choix est intelligent en ce qu’il offre un bon équilibre entre les différentes civilisations qui comprennent aussi les celtes et les égyptiens. Il montre aussi le sérieux des recherches historiques et de l’attention portée à leur impact sur les aspects ludiques.

Côté règles, le jeu repose sur un très classique duo caractéristiques/compétences. Les premières servent essentiellement de modificateur aux secondes, qui constituent le cœur du système. Pour réussir une action, il faut faire moins que la compétence adéquate avec 1d20. Les combats se déroulent eux aussi sous la traditionnelle forme d’un enchainement d’actions par ordre d’initiative.

Ce classicisme constitue l’un des plus gros défauts de Oikouménè. Malgré un travail soigné, notamment la création de personnage par culture et classe sociale ou encore sur les terminologies utilisées, ce système, quoiqu’éprouvé, manque cruellement de saveur. Il lui manque ce petit "plus" qui le distinguerait des autres et lui donnerait une touche résolument antique.

L’autre défaut de ce livre de base réside dans la campagne proposée. Quoique reposant sur des bases solides – quoique là encore classiques – et permettant une excellente première approche du monde antique, elle se révèle relativement mal développée. A plusieurs reprises, elle part notamment du principe que les joueurs feront certains choix ou déductions, sans proposer des alternatives ou des conseils au MJ pour garder le scénario sur les rails.

Oikouméné est néanmoins très loin d’être un échec. D’abord, parce qu’aucun des défauts évoqués ci-dessus n’est rédhibitoire. Ensuite parce que c’est l’un des rares jdr, si n’est le seul en ce moment, à proposer une approche générique du monde antique, là où le contexte d’un Praetoria Prima est beaucoup plus restreint. Il pose donc une base suffisamment solide pour y ajouter ses propres développements ou en attendant de futurs suppléments.