Une « Tinker Bell » animée qui atterrit directement dans le rayon des dvd. Destiné exclusivement au marché de la vidéo, ce long métrage est annoncé comme le premier d’une série de quatre films mettant en vedette Clochette, à l’origine personnage secondaire des pièces et romans de James M. Barrie.
Produit à l’initiative de John Lasseter (de Pixar), La Fée Clochette raconte les premiers pas du personnage dans la Vallée des Fées, nichée en plein cœur du Pays Imaginaire. Entourée d’une ribambelle de copines ailées (et de Clark et Gable, deux féetauds patauds), elle ignore encore tout de Peter Pan, de Londres, de Wendy, des garçons perdus de Neverland, et elle coule des jours heureux à rythmer l’arrivée des saisons. Alors que tous les habitants de la Vallée s’apprêtent à mettre en place l’arrivée du printemps, Clochette a la désagréable surprise de se voir refuser le droit d’accompagner ses amies à travers le monde pour lancer officiellement la saison. Motif : elle est une fée bricoleuse, et, au royaume de la Reine Clarion, aucune fée de cette condition n’est autorisée à parcourir le monde extérieur…
Je ne vais pas ruiner le suspense en vous apprenant que la « bricoleuse » arrivera quand même à ses fins et pourra, dans les ultimes plans, voleter aux alentours de Big Ben et du Tower Bridge. À vrai dire, on est ici loin, très loin même, de la noirceur des thèmes abordés dans les écrits de James Barrie (et repris avec le plus grand talent par Régis Loisel dans sa série de bandes dessinées), de même qu’on s’éloigne radicalement de la psychologie première de la célèbre fée (chez Barrie comme chez Loisel, Tinkerbell est une peste caractérielle doublée d’une jalouse maladive). Tout ici se veut coloré, léger, rassurant, et à destination exclusive du plus jeune public. Bien sûr, ce n’est pas une raison pour sombrer dans la mièvrerie édulcorée, mais comme je le disais, le film est destiné au marché du dvd, et il ne s’agirait pas non plus de rebuter les parents gentils qui, à l’approche de Noël, mettront la main à la poche pour faire plaisir aux bambins. Irréprochable d’un point de vue technique (le film bénéficie quand même de près de vingt ans d’innovation Pixar en matière d’animation 3D), La Fée Clochette déroule ainsi 75 minutes de divertissement inoffensif… ou presque, car, à y bien regarder, le film s’avère tout de même gênant à certains égards, notamment lorsqu’il véhicule un système de codes esthétiques des plus rances, faisant d’une jolie blonde une héroïne positive, apprêtée comme pour aller au bal de fin d’année, et d’une fée aux cheveux noirs une chipie envieuse, tricheuse, teigneuse. Des réserves que certains jugeront peut-être négligeables, mais je suis sûr que beaucoup de pères et mères ont à cœur de faire voir autre chose à leurs gamins.