Morcaï Treznor a faim, très faim. Norma ; c’est un ogre. C’est cette faim qui l’a poussé à venir à Perdition, cité de tous les vices fondée par des colons arrivés du vieux monde quelques décennies plus tôt. Lorsque, provoqué, Morcaï écrase une elfe dans une rixe de bar, il est loin de se douter qu’il met le doigt dans les engrenages du pouvoir qui vont se mettre en branle autour de l’événement de l’année : la Rencontre qui oppose tous les héros des alentours. Morcaï va vite être entraîné dans une spirale qui s’enroule des bas-fonds jusqu’aux plus hautes sphères.
Dans ce roman, Johan Heliot se plie à un exercice de style comme il avait pu le faire dans La harpe des étoiles, mais cette fois-ci en Fantasy. Il dépasse d’ailleurs très vite le cadre étriqué des conventions pour nous narrer une histoire imprégnée de sa verve humoristique (assez proche de sa nouvelle Les salaces enluminures du petit peuple lubrique) et mâtinée de vaudou et de shamanisme. La cité de Perdition est, avec son parc central et ses créateurs pèlerins ayant traversé l’océan, une parabole de New-York, mais ce n’est pas la seule référence, et vous passerez un agréable moment à retrouver chaque petit clin d’œil glissé par l’auteur dans ce roman.
La couleur de la faim est plutôt à déconseiller aux fanatiques d’heroïc fantasy, mais à recommander vivement à tous ceux qui ont envie de s’amuser intelligemment, avec ce roman qui n’a rien d’une parodie même s’il joue avec les codes du genre. Du bon Johan Heliot, tout simplement.