La folie et ses déclinaisons ont largement trouvé leur place dans l’animation, où la réalité a tôt fait de basculer dans l’horreur…

 

Folie ? Vengeance ?

Primordiale, la vengeance liée à la défense de son honneur est récurrente dans nombre d’animés… Trahi puis assassiné par son meilleur ami, Brandon, transformé en mort-vivant, revient prendre sa revanche dans GunGrave (Toshiyuki Tsuru, 2003), qui tourne très vite à la folie meurtrière dans une ambiance de shoot’em up… Également en proie à la démence, Lucy, dans Elfen Lied (Mamoru Kanbe, 2004), traumatisée par des expériences subies dans un laboratoire, s’engage dans une sanglante aventure psychotique dont peu réchapperont. Soulignant la très mince limite entre folie et désir obstiné de vengeance, le personnage est partagé entre ses pulsions meurtrières profondes et son envie de normalité… Ramenées d’entre les morts par une expérience médicale, puis décimées par les militaires, les créatures de Casshern (Kazuaki Kiriya, 2005), adaptation live d’un manga, forment une armée bien décidée à mettre fin à l’humanité. Un thème que l’on retrouve dans la série Monster (Masayuki Kojima, 2004), où la science devient l’instrument de la vengeance en créant des monstres sanguinaires.

 

 

Fantasme et obsession

Un rêve peut brutalement se transformer en obsession cauchemardesque. Les exemples ne manquent pas dans l’animation… Jeune garçon désœuvré, Jun, dans Rozen Maiden (Chikako Shibata, 2004), commande sur Internet des poupées dont il devient rapidement l’esclave, à la fois obsédé par leur monde et contraint de se soumettre à leurs fantasmes. Le Portrait de la petite Cosette (2004) met en scène un antiquaire hanté par l’esprit d’une fillette assassinée. Servi par une réalisation déroutante, cet OAV signé par Akiyuki Shinbo nous entraîne dans une profonde réflexion sur la normalité et la folie. Autre récit d’une obsession passionnelle, Les Noces funèbres (Tim Burton, 2005) suit les tribulations d’une mariée morte tourmentée par le souvenir de son amour perdu au point d’entraîner les vivants dans son sombre univers.

 

 

Entre réalité et hallucinations

Le thème du basculement dans une dimension imaginaire est illustré par Le Voyage de Chihiro (Hayao Miyazaki, 2002). Devant le spectacle de ses parents transformés en cochons, et entourée de personnages tous plus étranges les uns que les autres, Chihiro se dématérialise peu à peu et perd tout contact avec le monde réel… Folie et solitude vont de pair dans l’étonnant Interlude (Tatsuya Nagamine, 2004), où un jeune garçon voit ses cauchemars prendre corps, ainsi que dans Perfect Blue (1997), long métrage dans lequel Satoshi Kon suit le destin tragique de Mima, une chanteuse persécutée par un fan dérangé. Submergée par la paranoia et l’angoisse, la jeune femme se retrouve la proie de chimères et bascule peu à peu dans la schizophrénie. Du même auteur, Paranoia Agent (2004) nous montre des héros tellement désireux d’échapper à leur quotidien qu’ils finissent par sombrer dans la folie, tandis que le magnifique Paprika (2005), servi par une réalisation presque névrotique, relate le voyage au bout de la démence d’une inspectrice qui, par le biais d’une machine, parvient à s’introduire dans les esprits pervers, jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus, finalement, dissocier fantasme et réalité. Enfin, le thème de la perte d’identité est également au cœur du long métrage de science-fiction A Scanner Darkly (Richard Linklater, 2006), d’après Philip K. Dick, dans lequel Fred, policier, reçoit l’ordre d’espionner Bob Arctor, accro à la « Substance M », et qui n’est autre que… lui même !