Ne voyez pas là une reprise du classique muet de 1916 de D.W. Griffiths. Intolérance est une collection de trois courts métrages (Intolérance, Intolérance 2 et Intolérance: la Solution finale) réalisés entre 2000 et 2004 par l’Anglais Phil Mulloy. Après une carrière dans la production audiovisuelle britannique, l’homme est parti s’installer il y a près de vingt ans en pleine campagne galloise, dans le confort rustique d’une grange réaménagée en studio d’animation. On lui doit depuis une trentaine de courts surréalistes bricolés en toute indépendance et dans la plus grande liberté de ton (une première anthologie, Mondo Mulloy, est sortie dans les salles en 2004).

Une bobine de film pêchée dans l’espace révèle aux humains l’existence des Zogs. Ces bipèdes sont assez semblables à nous, à ceci près que leur tête et leurs organes sexuels sont inversés. D’où des comportements sociaux « différents », scandaleux, qui à l’écran valent leur pesant de cacahuètes (attention les yeux !) mais s’avèrent intolérables pour les pauvres humains. On pousse des clameurs, on brandit des crucifix et hop ! une croisade spatiale se met en branle pour aller atomiser la planète lointaine. De leur côté, les Zogs ont fait une découverte analogue concernant les habitants de la Terre et s’embarquent à leur tour pour une guerre sans merci…

Ce conte moral et vachard de 55 minutes exploite à plein régime le « nonsense » cher aux Britanniques, pour un résultat à l’humour non pas cynique mais désabusé quant à l’esprit (auto)destructeur qui anime l’être humain (représenté par Mulloy par un cortège de silhouettes noires qui renvoient aux mascarades mortuaires mexicaines). En passant, Mulloy s’approprie tout un tas de motifs chers aux amateurs de fantastique (l’invasion extraterrestre camouflée, le néo-David Vincent « qui les a vus » et doit combattre seul, etc.) pour finalement conclure son film par un paradoxe dans la grande tradition de la S.F. où les réalités parallèles sont de mise et où le serpent temporel se mord la queue. Bref, tout cela est fort pertinent, parfois longuet mais totalement dingue et, à la fin, une question demeure: Jesus! qu’est-ce que Mulloy peut bien faire pousser, au juste, dans le secret de sa douillette grange-laboratoire ?