A dix ans, Michael Myers ne part pas gagnant dans la vie. Hormis sa maman strip-teaseuse, personne n’est gentil avec lui : ni son salopard de beau-père (loquedu au chomedu imbibé du matin au soir), ni sa grande soeur (drivée par ses seules hormones), ni la poignée de bullies — figure récurrente du cinoche US, soit dit en passant — qui ne font rien qu’à le charrier à longueur de récré. Après s’être fait la main sur son hamster et quelques bestioles errantes, Michael est décidé : il va falloir mettre de l’ordre dans tout ça. Une humiliation de plus le soir d’Halloween, et le bambin, sortant le couteau à viande, passe du côté obscur. Exeunt beau-père, sister et boyfriend d’Halloween. Lorsque maman rentre du Paradiso, seule la soeurette de Michael, encore bébé, a été épargnée, et il ne reste plus qu’à confier fiston aux bons soins du Dr Loomis, au pavillon des agités…
Présenté comme ça, il semblerait que Rob Zombie ait décidé (après House of 1,000 Corpses et The Devil’s Rejects) de remettre une couche sur sa peinture de l’Amérique « white trash ». Ce n’est pas faux, mais je ne vous ai conté ici que le premier acte de la tragédie, qui en compte trois. Premier acte qui, du reste, est remarquable de concision et d’efficacité, et dominé par la présence du jeune Daeg Faerch, interprète impeccable de Myers à 10 ans. Cheveux longs et blonds masquant — déjà — le visage, regard buté et imprénétrable… Dès les premières scènes, on sent le bloc de fureur prêt à péter. Et lorsque la violence éclate, elle est dérangeante et sale (chez Rob Zombie, on crève lentement, en geignant et suppliant, comme jadis chez Craven, période Last House On The Left).
L’acte 2 suit Michael entre les quatre murs de l’asile où son pédopsy, Loomis, ne truove rien de mieux que de lui faire ressasser encore et toujours la terrible nuit d’Halloween. Guère étonnant, donc, que l’enfant se mure pour de bon dans l’autisme… De traumatismes divers en péripéties sanglantes, Mikey finit par s’échapper. Il a alors 25 ans, et c’est un colosse. C’est le début de l’acte 3, dans lequel Zombie attaque la partie « remake » de son film, soit le récit entier du film original de John Carpenter fort habilement condensé en 45 minutes.
Sec, prenant, passionnant (et en même temps élégant : la photo granuleuse est splendide, tout comme les cadres en Scope savamment composés), Halloween est tout ce que Massacre à la tronçonneuse, au commencement (autre « prequel » d’un classique de l’horreur, sorti en janvier) n’était pas. De son propre aveu, Rob Zombie n’envisage pas de se cantonner au seul registre de l’épouvante. Quelles que soient ses intentions futures, qu’importe : en trois films à peine, le bonhomme s’est affirmé comme l’un des grands artistes actuels de la frousse sur grand écran.