Publié par Interkeltia Editeur, Embarquement pour Citerre commence un peu à la manière de la défunte série télévisée la quatrième dimension. Un homme se réveille un matin banal, quitte son appartement pour se rendre à son travail, et, surprise, se retrouve à une quarantaine d’années dans un futur qu’il ne reconnaît pas. Certes, il ne se heurte pas à un univers de science-fiction empli de lasers et autres soucoupes volantes. Cependant, son dépaysement n’en est pas moins total. En effet, le héros découvre une utopie où la délinquance n’existe presque plus, de même que les notes en classes, où le référentiel d’argent n’est plus l’or mais l’heure de travail manuel, où les voitures à air comprimé purifient l’air durant leur fonctionnement et où les maisons ressemblent à des œufs à demi-enterrés pour mieux se prémunir contre les fréquentes tempêtes.
Fort heureusement pour le pauvre homme, il fait rapidement la connaissance d’une femme charitable qui accepte de l’héberger et, surtout, de lui expliquer les profonds changements advenus dans la société planétaire durant ces quarante années zappées par le personnage principal.
Cette situation hors du commun entraîne le lecteur en même temps que le héros à la découverte de cette utopie. Rapidement, il devient évident que les idées véhiculées par le roman ne sont pas de simples vues de l’esprit. Fruit de nombreuses années de débats et de réflexions comme le précise la préface de André-Jacques Holbecq, Embarquement pour Citerre permet de montrer ce que pourrait devenir notre quotidien si les mentalités se modifiaient légèrement. Car, finalement, ce qui, de prime abord, apparaît comme un changement de paradigme fondamental, n’est rien d’autre que la prise de conscience de vérités enfouies en chaque être vivant de notre planète. À tout bien y réfléchir, l’utopie décrite dans ce roman devient, au fil des pages, tellement évidente de simplicité et de faisabilité que le lecteur ne peut que s’exclamer: «et pourquoi pas!».
Roman original paraissant tomber à un moment clé de l’évolution de la civilisation planétaire, Embarquement pour Citerre n’est jamais moralisateur. Il se contente d’énoncer des solutions sous une forme agréable à lire. Chacun est donc libre de le considérer comme un simple ouvrage d’anticipation. Pourtant, malgré l’épaisseur des œillères que nous applique la société actuelle si riche en dérives et en aberrations de toutes sortes, le discours du roman de Marie Martin-Pécheux ne laisse personne indifférent. Et cela ne peut qu’apporter un peu plus d’humanité en chacun de nous.
Dans le livre, la civilisation a dû évoluer brusquement à la suite de nombreuses catastrophes planétaires. Reste à espérer que les êtres humains de notre époque n’attendront pas une telle extrémité pour se réveiller. Théodore Monod a dit: «l’utopie est simplement ce qui n’a pas encore été essayé!», alors, qu’attendons-nous pour essayer?