Honor et ses parents ont emménagé sur l’île 365, dans la mer Tranquille. La vie quotidienne est gérée par la Compagnie, qui instaure un véritable culte autour de la Mère Nourricière. En effet, la Compagnie affirme qu’après le Déluge qui a entraîné guerres, famines et décimation de la population mondiale, la Mère Nourricière a voulu protéger les îles restantes en bâtissant des cités sûres. Ainsi, les habitants sont persuadés que la Mère Nourricière a recouvert les Mers Polaires d’une Enceinte et a instauré un Nouveau Climat grâce à des températures reglées chaque jour. Un mot revient sans cesse : sécurité. La Compagnie entretient la peur. "Tant que tu voudras être en sécurité, ils gagneront. Ils décident combien d’enfants il doit y avoir dans une famille, comment ils doivent s’appeler, où ils doivent aller à l’école et ce qu’ils doivent penser. Ils choisissent où doivent vivre les gens, ce qu’ils doivent acheter et comment ils doivent s’habiller. Ils contrôlent ce que les gens lisent. Ils essayent de contrôler le temps. (…) Ils stockent toutes nos caractéristiques: nom, âge, emploi et orientation scolaire, activité criminelles éventuelles. La Compagnie possède des informations sur nous tous. (…) Leur but est de contrôler tout le monde."
Les parents d’Honor et les parents d’Hélix, un ami de la jeune fille, font partie d’une toute petite minorité qui refuse de se soumettre à la vie organisée par la Compagnie. C’est ainsi que l’héroïne voit naître son petit frère, Quintilian, alors que cela n’est "Pas Autorisé". Mais la rebellion n’est pas sans danger. Ceux qui osent être réfractaires à tout ordre donné disparaissent mystérieusement. Que va-t-il arriver aux parents d’Honor ? La jeune fille va-t-elle réussir à se défaire de ce terrible engrenage ? Va-t-elle découvrir ce qui se cache derrière cette organisation ?

De l’autre côté de l’île est un formidable roman d’anticipation. Allegra Goodman offre aux lecteurs une description riche et précise de la société en question. On y retrouve les caractéristiques des régimes totalitaires, comme le contrôle de la pensée, l’importance de la propagande, l’embriguadement des jeunes ( à dix ans, les enfants peuvent entrer chez les Jeunes Ingénieurs ), la supervision de la culture ( la possession de tout objet culturel est interdite et la Compagnie censure les passages compromettants des livres de la bibliothèque ), la reformulation de l’Histoire, ou encore l’attribution de matricules lors de l’obtention des pièces d’identité. Tout est crédible. L’immersion du lecteur dans cette société est donc réellement terrifiante.
Mais ce livre met aussi en scène une jeune fille qui s’élève face à cette opression. Magnifique portrait d’Honor. Le lecteur la voit grandir au sein de cette collectivité malfaisante, être enrolée malgré elle, être tiraillée entre ce qu’elle a appris à l’école et le comportement de ses parents, entre sa vie d’enfant et de lourdes responsabilités. Et puis finalement, on la voit agir, se battre, se révolter. Pour ses parents, pour son frère, pour son ami Hélix, pour la Vérité.
De l’autre côté de l’île est aussi un roman d’aventure. L’action est découpée en quatre parties, chacune correspondant à quatre grandes étapes de l’histoire. Le rytme du récit est soutenu et le suspense entretenu à chaque page. On dévore ce livre !

La parution de ce roman aux éditions Thierry Magnier confirme encore une fois la qualité de la collection "Grands Romans" que l’on connaît maintenant depuis mai 2009.
De l’autre côté de l’île possède tous les ingrédients d’un livre réussi : de l’aventure, du suspens, des portraits forts, et même de la poésie avec une magnification de la nature véritable. Grand roman à découvrir de toute urgence !