Paré pour une nouvelle année au Lycée Suzuran ? Ou plutôt pour un second round (toujours arbitré par Takashi Miike) car on distribue toujours autant de torgnoles dans ce cloaque de banlieue nipponne. Crows Zero avait vu la victoire de Genji Takaya, fils de yakuza, et son accession au trône de « roi de Suzuran », le bahut sans profs livré à la jungle des « corbeaux ». Dans ce nouvel opus toujours adapté du manga Crows, Genji, Serizawa, Makise et leurs potes (les personnages et leurs interprètes du premier volet, Shun Oguri en tête, sont tous de retour) vont avoir fort à faire avec le gang du lycée Hosen, des durs tout en gris qui entendent bien leur tanner le cuir. Une nouvelle épreuve de force pour les « vrais hommes », ceux qui « se battent avec leurs poings »…

Ces derniers propos rapportés sortent de la bouche de Narumi (Nobuaki Kaneko), le chef de la bande rivale. Un macho notoire ? Eh bien non : une bonne part de l’originalité de Crows Zero II vient de ce personnage, dont le physique fin et les colliers n’évoquent en rien l’allure d’une brute. S’il n’hésite pas à flanquer des beignes comme tous ses comparses, Taiga (« Tiger ») Narumi éprouve une attirance « trouble » pour le beau Genji (voir leur rencontre nocturne, où Narumi propose sa flamme à Genji, cigarette au bec), et il porte par ailleurs le deuil de Makio, l’ancien chef de Hosen tué dans une rixe deux ans plus tôt. Narumi avoue aimer traîner dans le gymnase du lycée, où plane encore, dit-il, l’odeur de Makio. « Mais je ne suis pas homo », se défend le Tigre. Certes… D’autres personnages viennent enrichir l’atmosphère singulière (pour un cadre aussi viril) des deux heures de métrage : Tatsuya, minet au visage fermé, frère du défunt Makio, et le pâle Ryo, encore plus androgyne avec ses longs cheveux et son ombrelle.

Dans pareil contexte, les trente minutes de baston homérique qui ferment le film prennent un tour particulier, les affrontements musclés devenant des simulacres sauvages d’actes sexuels. Ayant investi le lycée Hosen, les deux bandes se massacrent à tout va dans les cages d’escaliers et grimpent, grimpent, jusqu’à atteindre la terrasse, au dernier niveau, où l’orgie culmine lors d’un corps à corps sanglant et orgasmique entre Genji et Taiga Narumi…

Je ne sais pas si on tient un futur titre-phare de la culture gay (ce n’était sans doute pas le but de Takashi Miike), mais cette dimension apporte sel et piment à un métrage qui manque d’un peu de consistance. Le premier volet relatait l’ascension du loup solitaire Genji dans la hiérarchie de Suzuran, et son parcours s’avérait captivant. Le scénario gagnait également en épaisseur en suivant l’évolution de personnages secondaires. Des qualités absentes de ce second volet : le récit de la lutte inter-lycées est parfois longuet, et si quelques intrigues parallèles existent, elles sont sous-traitées, expédiées en deux ou trois scènes. Ainsi Noboru Kawanishi, ex-élève de Suzuran sortant de maison de correction, se retrouve à la croisée des chemins : l’ancien voyou deviendra-t-il yakuza ? Va-t-il se ranger, se fondre dans l’anonymat de la société ? Le personnage et son destin occupent une place importante dans la première demi-heure avant que le montage le laisse curieusement de côté. Petit plus rock’n’roll : les entractes musicaux — grosses guitares, ballades, r’n’b — qui viennent ponctuer l’histoire quand les jeunes font une pause au nightclub tenu par Ryuseikei, le clan mafieux du père de Genji.

Se pourrait-il que Miike et toute la bande rempilent pour boucler une trilogie ? La conclusion n’invite pas du tout à le penser, à moins que l’ultime épisode délaisse les héros des deux premiers volets pour introduire de nouveaux personnages ou se pencher sur le cas d’outsiders, comme Tatsuya ou l’énigmatique Rindaman. Il y a, c’est vrai, encore fort à faire avec la somme des 26 volumes du shonen d’origine et les 22 autres de Worst, série à ce jour inachevée prolongeant les aventures des délinquants de Suzuran…

Sortie le 4 novembre (Wild Side Video). Crows Zero I et II sont également proposés en coffrets deux films, en dvd comme en blu-ray.

Caractéristiques techniques

DVD
Image :
2.35, 16/9 compatible 4/3
Son : Japonais Dolby Digital 5.1, Français DTS 5.1 et Dolby Digital 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 128’

Blu-ray
Image :
2.35
Résolution film : 1080/24p
Son : Japonais et Français DTS Master audio 5.1
Sous-titres : Français
Durée : 134’ — durée annoncée par l’éditeur et bizarrement supérieure à celle du support dvd (la version « pellicule » dure pourtant 2h13, ce qui correspond bien au 128’ du dvd, à 25 images/secondes…)

Suppléments (dvd et Blu-ray) : Making-of (25’) et bandes annonces.