Anna emménage avec Anders, son fils de 8 ans, dans un immeuble HLM miteux de la banlieue d’Oslo. Une adresse conservée secrète sur décision de justice car Anna cherche à échapper à son mari violent. La jeune femme n’est pas tranquille pour autant, tenaillée par l’angoisse de ne pouvoir faire face et se voir retirer la garde du gamin par les services sociaux.

Babycall est porté avec talent par Noomi Rapace, qui interprète Anna, de presque toutes les scènes. Pål Sletaune et sa comédienne brossent le portrait d’une jeune mère aimante, irréprochable, et qui pourtant perd pied. Aux frontières de la paranoïa, Anna fait l’acquisition d’un babyphone pour s’assurer que son fils dort paisiblement, et que personne ne s’introduit dans sa chambre. Et l’appareil capte un signal provenant d’un autre appartement. Anna y entend des cris de violence domestique et des pleurs d’enfant. Elle entreprend de localiser le logement dans l’immeuble, une enquête qui vire à l’obsession.

Le fantastique de Babycall ne relève pas du surnaturel mais de la distorsion de la réalité perçue par un esprit perturbé. Quelque chose cloche chez Anna, Pål Sletaune livre suffisamment d’indices pour qu’on s’en aperçoive très vite. Le récit étant raconté à la première personne, le spectateur ne peut se fier à ce qu’il voit, et il faudra attendre les dernières minutes et un changement de point de vue/de perspective pour saisir pleinement ce qui est en train de jouer.

Le Grand Prix remporté au dernier Festival de Gérardmer est une récompense qui paraît usurpée. À vouloir jouer sur l’ambiguïté et plusieurs niveaux de narration, Sletaune tombe dans le piège de l’incohérence. Il m’est difficile d’en dire plus sans éventer la chute, mais disons que l’histoire, une fois conclue, laisse une sensation gênante d’inachevé, de mal ficelé. De déjà vu, également : les personnages, le cadre, le ton général du film font constater à quel point Dark Water d’Hideo Nakata fait aujourd’hui figure d’œuvre matricielle de tout un pan de la production fantastique actuelle.

Dans les salles françaises le 2 mai 2012.