Après une troisième guerre mondiale qui a laissé notre planète en ruines, la mercenaire Deunan Knute et son compagnon d’armes cybernétique Briareos vivent des missions commanditées par Two Horns, un cyborg régnant sur les décombres de la ville de New York. Ils croisent un jour le chemin d’Iris et Olson, qui affirment venir d’une cité légendaire, Olympus, dernier havre de paix et espoir de l’humanité.

Toujours réalisé par Shinji Aramaki (après Appleseed et Appleseed: Ex-Machina), ce troisième film fait à première vue office de « prequel », avec des personnages qui n’ont encore jamais mis les pieds à Olympus (pour mémoire, le premier film débutait par l’arrivée de Deunan dans la fameuse ville utopique régie par l’intelligence artificielle Gaïa). Mais on repère tout de suite un hiatus de taille : la découverte d’Olympus par Deunan était l’occasion des retrouvailles avec Briareos, militaire humain devenu cyborg depuis leur précédente rencontre. D’où notre surprise de voir les deux héros ensemble dans ce film à l’action antérieure ! Le scénario d’Alpha se moque de la continuité, et on n’a pas d’autre choix, pour maintenir un peu de cohérence, que de prendre cette nouvelle histoire comme une variante indépendante des premiers films. Cela demande un petit effort, la pilule étant quand même dure à avaler.

À part ça ? Tout d’abord, ce troisième opus permet de mesurer les progrès phénoménaux réalisés en dix ans en matière d’animation photo-réaliste. Comparé au premier film, en 2004, Ex Machina (2007) marquait déjà une nette évolution du character design. Dans la mouvance de la version cinéma d’Albator (également signée Aramaki), Alpha enfonce le clou avec des personnages dont la gestuelle peut encore paraître un peu raide, mais à qui il ne manque plus grand-chose pour passer pour de vrais comédiens en chair et en os. Les gros plans sur les visages révèlent une foule de détails (tâches de rousseur, ecchymoses, traces de camboui…) et les yeux brillent comme s’il y avait une âme derrière. La première à bénéficier de ce traitement est bien sûr le commandant Knute, que tous les geeks un peu schizos sur les bords rêvent d’épouser : Deunan est une créature de manga, avec la taille de bonnets qui sied à toute grande héroïne de japanime, et sa beauté a assuré sa notoriété bien au-delà de la sphère du cinéma d’animation (pour mémoire, la combattante portait dans Ex Machina des tenues créées pour elle par la styliste Miuccia Prada).

Décors, armes et véhicules sont traités avec le même soin et sont stupéfiants de véracité. Dommage que ces qualités techniques et artistiques soient au service d’une histoire qui, indépendamment de la rupture de continuité mentionnée plus haut, ne s’avère pas toujours captivante : prenant sur eux d’assurer la protection d’Iris et Olson, les deux émissaires d’Olympus, Deunan et son coéquipier Briareos sortent l’artillerie lourde pour dégommer tous les nuisibles qui veulent faire la peau au duo, une « bioroïde » et un cyborg investis d’une mission tenue mystérieuse mais qui ne donnera pas lieu à de grandes révélations. Les passages dialogués n’arrivent ni à passionner ni à émouvoir, et on guette donc surtout l’arrivée des séquences d’action, époustouflantes, rythmées par le cliquetis des armes à feu et les déflagrations. Outre les effets de bruitage, la bande-son est habillée musicalement par une compo électronique stimulante de Tetsuya Takahashi, collaborateur régulier de Shinji Aramaki, et elle contient aussi plusieurs titres electro-house signés du fameux Skrillex qu’on ne se mettrait pas autrement dans les oreilles mais qui ne détonnent pas dans l’univers cyberpunk du film.

Sortie du film en DVD le 23 juillet 2014 (Sony Pictures Home Entertainment).