Avec Le Seigneur de Cristal, Alexandre Malagoli nous fait découvrir un monde scindé en quatre suite à une terrible malédiction. Dans l’un de ces mondes, le jeune Empereur Odrien s’éveille dans un silence troublant. La vérité apparaît bien vite terrifiante : son peuple a disparu. Seuls l’Empereur et quelques rares personnes feront face à ce vide aussi soudain qu’incompréhensible. Et puis il y a ces étranges miroirs de cristal apparus dans les jardins impériaux. Des miroirs? L’Empereur et ses compagnons découvriront assez vite qu’il s’agit en réalité de passages vers d’autres mondes… L’aventure peut commencer…
Petite plongée dans ce conte féerique et ce qu’il tente de nous apporter en compagnie d’un bien sympathique auteur…

Khimaira : On dit souvent que l’identification du lecteur au héros donne une force à la lecture d’un roman. En choisissant un héros adolescent (l’empereur Odrien) ne pensez-vous pas rendre difficile l’entrée dans la fiction pour un public adulte ?
Alexandre Malagoli: J’ai peut-être eu tort, mais je pensais justement faciliter l’identification de tous. En règle générale, l’adolescent fait rêver l’enfant, qui brûle de vivre des changements aussi enivrant que lui. Il fascine l’adulte, qui sait ce qu’il a perdu sans s’en souvenir suffisamment. Il n’est pas encore sexué de manière trop tranchée, ce qui permet aux hommes comme aux femmes de s’identifier à lui. J’espère précisément que ce choix permettra au lecteur adulte de se mettre à la place d’Odrien, et de revivre un peu de son enfance.

K: Le thème du miroir est particulièrement attrayant. Vous, vous le considérez dans Le Seigneur de Cristal comme une porte. Expliquez-nous un peu votre choix.

AM: Je ne suis certes pas le premier à faire passer mon personnage « au travers du miroir ». C’est principalement cette référence qui a motivé mon choix : les aventures d’Alice m’évoquent la magie de l’enfance, l’angoisse et la fascination face à l’inconnu. Je me suis toujours demandé – je me le demande encore – quels sont les mondes, les êtres qui vivent de l’autre côté des miroirs. Ajoutez à cela un jeune empereur un peu narcissique, et ce thème devient indispensable…

K: Dans votre roman, les mondes parallèles ont des temps différents. D’où vous est venue l’idée de jouer sur les temps mais aussi les climats ?

AM: Pour l’écoulement du temps contrasté, j’ai eu cette idée principalement pour rendre impossible l’histoire d’amour entre les héros. Il faudra lire le roman pour savoir si je me suis finalement laissé attendrir ! En ce qui concerne les climats, c’est en rapport aux premières images qui me sont venues à l’esprit lorsque j’ai commencé à travailler sur cette histoire. J’ai vu la reine des neiges et son royaume blanc. L’idée des univers parallèles est venue juste après, car ce royaume des neiges semblait fragile et mélancolique : il ne pouvait être pour moi que « l’Autre Monde »,la Faërie, en quelque sorte.

K: Vous ne vous attardez pas beaucoup sur les ennemis. Ils semblent être l’incarnation d’un mal absolu, qui plus est animal. Pourquoi ce choix d’un mal obscur ? Pensez-vous que moins en on sait sur le Mal, plus il nous fait peur ?

AM: Pas forcément. Mais dans ce cas-là, oui : ça nous renvoie à quelques références intimes… Puisqu’il s’agit d’un mal, non pas extérieur, mais faisant partie intégrante de l’ensemble. Les hommes-démons ne sont pas nécessairement maléfiques, d’ailleurs : ils sont simplement faits de fièvre et de fureur, ils représentent les pulsions et la violence. Ils risquent d’empêcher les peuples des autres mondes de s’épanouir dans leur poésie, leur quête d’harmonie ou leur recherche d’élévation… tout comme nos propres pulsions présentent ce risque pour chacun de nous. Voilà pourquoi je les ai affublé de caractères bestiaux, pour évoquer non pas le monde animal, mais la part de notre nature encline à la violence et à la colère.

K: Parlez-nous un peu de vos autres projets en cours.
AM: Actuellement, je mène plusieurs choses de front. Je planche à la fois sur un projet de BD et sur mon prochain roman chez Bragelonne, le début d’un cycle. (Qui, tout à fait entre nous, me vaut pour l’heure de m’arracher les cheveux… Mais c’est normal : j’essaie d’être plus exigeant avec moi-même, de faire quelque chose de vraiment abouti. On verra bien…) Par ailleurs, j’ai aussi une trilogie en cours chez Bayard.

Le Seigneur de Cristal est paru aux éditions Bragelonne.