Un mythe revisité par un maître de l’ombre

En ce mois de décembre 2025, alors que les nuits s’allongent et que l’hiver enveloppe la France d’une atmosphère propice aux récits fantastiques, les éditions Gallimard, via leur collection Papillon Noir, offrent aux amateurs de littérature et d’art un objet aussi rare que précieux : une réédition illustrée de Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary Shelley, sublimée par les dessins de Stan Manoukian. Paru le 19 novembre 2025, cet ouvrage de 256 pages, au format imposant et à la couverture cartonnée, s’impose comme un pont entre deux siècles, entre le romantisme noir du XIXe et l’esthétique contemporaine, entre le texte fondateur de la science-fiction et l’art graphique le plus exigeant.


Frankenstein, un roman visionnaire aux résonances éternelles

Genèse et contexte historique Écrit en 1816 par une Mary Shelley âgée de seulement dix-neuf ans, Frankenstein naît d’un défi littéraire lancé par Lord Byron : écrire une histoire à faire dresser les cheveux sur la tête. Le résultat dépasse toutes les attentes. Publié anonymement en 1818, le roman explore les dérives de l’ambition scientifique, l’isolement, les zones d’ombre de l’âme humaine et les limites éthiques de la création. À travers le récit épistolaire de Victor Frankenstein, jeune savant obsédé par l’idée de donner la vie à une créature assemblée à partir de fragments humains, Mary Shelley pose des questions toujours actuelles : jusqu’où peut-on aller au nom de la science ? Où commence et où s’arrête l’humanité ?

Thèmes majeurs et modernité

  • La responsabilité du créateur : Victor Frankenstein, en abandonnant sa créature, déclenche une chaîne de malheurs. Le roman interroge la responsabilité morale du scientifique face à ses inventions, un thème qui résonne avec les débats contemporains sur l’intelligence artificielle ou les manipulations génétiques.
  • La solitude et le rejet : La créature, dotée de sensibilité et d’intelligence, est rejetée par son créateur et par la société. Sa quête désespérée d’amour et d’acceptation se transforme en une soif de vengeance, illustrant comment le regard des autres façonne notre identité.
  • La dualité homme/monstre : Mary Shelley brouille les frontières entre le bien et le mal, le beau et le laid, l’humain et l’inhumain. La créature, bien que monstrueuse en apparence, est souvent plus humaine que son créateur.

Stan Manoukian : l’artiste qui donne un visage à la créature

Un héritier de la gravure romantique Né en 1969 à Paris, Stan Manoukian est un artiste français dont le style, nourri par la science-fiction rétro, les films de monstres classiques et la littérature fantastique, s’inscrit dans la lignée des grands maîtres de la gravure comme Gustave Doré ou Bernie Wrightson. Formé à l’école Estienne, il a développé une technique unique de hachures et d’estompes, produisant des œuvres d’une précision et d’une profondeur remarquables. Son bestiaire fantastique, peuplé de créatures hybrides, a fait de lui une figure majeure de l’art contemporain, exposée dans le monde entier.

Une rencontre artistique parfaite Pour illustrer Frankenstein, Manoukian utilise le graphite, la gouache et des effets métalliques en Pantone argent, qui soulignent la dimension mécanique et artificielle de la créature. Ses images, à la fois puissantes et ciselées, captent l’essence gothique du roman : l’obscurité, la mélancolie, la beauté tragique du monstre. Chaque planche semble extraite d’un cauchemar romantique, où la lumière perce à peine les ombres, où la créature oscille entre la grâce et l’horreur.

Un dialogue entre texte et image Manoukian ne se contente pas d’illustrer : il réinterprète. Ses dessins prolongent le texte, ajoutent des couches de sens, invitent le lecteur à une immersion totale. Les effets argentés, par exemple, rappellent les expériences alchimiques de Victor Frankenstein, tandis que les jeux de lumière et d’ombre reflètent la dualité des personnages. Le résultat est une œuvre d’art totale, où chaque page est une invitation à la contemplation et à la réflexion.


La collection Papillon Noir : un écrin pour les chefs-d’œuvre

Une ambition éditoriale audacieuse Dirigée par Benjamin Lacombe, la collection Papillon Noir se positionne comme un laboratoire de création, mêlant grands classiques de la littérature et innovations graphiques. Son objectif ? Transformer le livre en objet d’art, en expérience sensorielle et narrative. Chaque titre est pensé comme un dialogue entre le texte et l’image, entre le fond et la forme, entre la tradition et la modernité.

Frankenstein, un objet livre exceptionnel Avec Frankenstein, Papillon Noir pousse l’ambition encore plus loin. Le livre, pesant plus d’un kilo, est un objet luxueux : couverture cartonnée, papier de qualité, mise en page soignée. Les illustrations de Manoukian ne sont pas de simples accompagnements, mais des éléments narratifs à part entière. Les effets argentés, les détails en relief, les jeux de matières transforment la lecture en une expérience presque tactile. C’est un livre qu’on ne lit pas seulement : on le vit.


Pourquoi cette édition est-elle indispensable ?

Pour les amateurs de littérature Cette édition permet de redécouvrir un texte fondateur sous un angle nouveau. Les illustrations de Manoukian éclairent des passages obscurs, soulignent des thèmes, offrent une nouvelle lecture visuelle du mythe.

Pour les passionnés d’art Les planches originales de Manoukian, par leur technique et leur esthétique, sont de véritables œuvres d’art. Le livre est une galerie portable, un hommage à la gravure et au dessin contemporain.

Pour les collectionneurs Avec son format imposant, sa qualité d’impression et son tirage limité, cette édition est appelée à devenir un objet de collection, un must-have pour les bibliophiles.


Un hommage à la beauté tragique

Frankenstein illustré par Stan Manoukian est bien plus qu’un livre : c’est une rencontre entre deux génies, deux époques, deux formes d’art. Mary Shelley y interroge les limites de l’humanité ; Manoukian y donne une forme visuelle à ces questions, tandis que la collection Papillon Noir en fait un objet de désir et de contemplation. À l’heure où la science et l’éthique sont plus que jamais au cœur des débats, cette édition rappelle que les grands mythes, comme les grands livres, ne vieillissent jamais.

Et vous, jusqu’où iriez-vous pour créer la vie ?