Dans les années 1980, aux États-Unis, l’ « église électronique » était en plein boom : l’ère des télévangélistes était arrivée, avec des prédicateurs déversant leurs sermons et imprécations dans les tubes cathodiques. Et ce fut l’époque, aussi, des scandales sexuels ou financiers concernant ces mêmes pasteurs télévisuels, Jimmy Swaggart ou Jim Bakker, prêchant à l’écran la bonne parole tout en fraudant le fisc ou commettant le péché de chair avec des prostituées ! Marc Meyers et Alan Trezza, respectivement cinéaste et scénariste, se souviennent sans doute de ces turpitudes médiatiques (ou des suivantes — il y en a eu d’autres depuis !). We Summon the Darkness se déroule donc dans l’Amérique provinciale du Midwest, dans cette même décennie 1980, où les postes de télé calés sur les canaux religieux relaient les propos du pasteur John Henry Butler, un champion de la lutte contre le rock’n’roll, la musique du diable coupable de la corruption de la jeunesse. Alexis, Val et Bev n’ont pas l’air de se soucier de genre d’émission : les trois amies taillent la route vers un concert de metal et une soirée d’enfer. Mais gare, dans le coin sévit un groupuscule sataniste qui défraie la chronique en massacrant au hasard de braves citoyens…

Y a-t-il encore des gens en 2020 pour s’imaginer que les fans de metal sont de dangereux lucifériens ? Les clichés ont la vie dure, et franchement ce n’est pas la scène du concert qui va faire changer d’avis les plus obtus (le groupe à l’œuvre est d’un amateurisme horrible). Mais sinon Meyers et Trezza s’emploient à tordre le cou d’un certain nombre de lieux communs. À qui ferait-on a priori le plus confiance si l’on rencontrait les personnages de cette histoire ? Aux trois jeunes filles qui parlent de maquillage dans leur voiture en suçotant des bonbons ? Aux trois metalleux buveurs de bière portant cuir noir qu’elles rencontrent sur le parking du concert (et qu’elles inviteront pour une after dans une belle villa) ? Au pasteur de la télé, qu’on écoute… religieusement jusque derrière les comptoirs des stations-service ? We Summon the Darkness est un thriller horrifique riche en surprises, dont une, de taille, à mi-projo, qui fait office à la fois de coup de théâtre et de coup d’envoi d’une série de péripéties dingues et sanglantes, très bien rythmées. Alan Trezza avait déjà à son actif le script du très bon Burying the Ex (2014, réalisé par Joe Dante), et ce nouveau scénario ne déçoit pas. Si vous avez passé un bon moment devant Satanic Panic (projeté début février à Gérardmer), le film de Marc Meyers fera sans problème votre soirée. Ultime satisfaction (et pas la moindre), comme Burying the Ex, le casting est dominé par la haute silhouette, le visage d’ange et les prunelles fascinantes d’Alexandra Daddario qui, en plus, endosse un rôle assez différent des personnages qu’elle a interprétés jusqu’ici, notamment dans des productions du même genre. Alexandra hypnotise la caméra et le spectateur aussi.

Film sorti le 10 avril sur Amazon et iTunes USA. Prochainement en France…