Le fantastique italien a une place à part dans le cœur des cinéphiles, même si l’âge d’or, hélas, est loin derrière nous. Fulci et Bava sont morts depuis longtemps, Dario Argento, qui fêtera cette année ses 80 ans, n’est plus que l’ombre de lui-même… et que sont devenus Michele Soavi, Sergio Stivaletti, considérés un temps comme la relève des vieux maestri, ou encore Federico Zampaglione (qui tenta, il y a une dizaine d’années, de ressusciter le cinoche de genre de son pays avec des œuvres intéressantes comme Tulpa et Shadow) ? Bref, il y a belle lurette qu’on ne se fait plus d’illusions sur l’avenir de l’épouvante transalpine, alors même que le cinéma fantastique espagnol — ou plus généralement hispanophone — a connu, quant à lui, une période faste dans les années 2000 à 2015, grâce surtout à Jaume Balaguero, mais pas seulement (L’Orphelinat, Les Disparus, Fin, Les Proies et beaucoup d’autres ont fait les beaux jours de pas mal de festivals spécialisés de par le monde). Et voici qu’arrive ce film totalement inattendu, Il nido (« le nid »), tourné par le dénommé Roberto De Feo. Une production italienne, tournée en Italie et en italien, qui d’un coup ravive le fol espoir d’un retour sur le devant de la scène de l’orrore all’italiana.

The Nest (le titre anglais international) ne se rattache pourtant pas tellement à une esthétique propre à la Botte : le décor unique du film, une imposante villa éclairée chichement, et les costumes des personnages évoquent plutôt le fantastique gothique anglais. Le domaine de la « villa dei laghi » — la villa des lacs — est l’endroit où vit le jeune Samuel, douze ans. Paraplégique, le garçon ne connaît rien du monde à part cet endroit ceint d’une clôture où il est né et où il grandit en compagnie de sa mère, Elena, une femme hiératique, sèche et stricte, qui a pris en charge toute l’éducation de son fils. Autour des deux personnages gravite une petite assemblée de proches (quelques parents, un médecin très, très louche, une poignée de domestiques). Tous constituent un microcosme à l’existence monotone, réglée jusque dans les moindres détails. Jusqu’à ce qu’arrive l’élément perturbateur, Denise, une adolescente venue de l’extérieur et confiée aux bons soins de l’étrange famille…

On ne divulguera pas grand-chose en disant que la présence de la jeune fille auprès de Samuel va l’inciter à envisager le monde au-delà de la propriété et, pourquoi pas, à songer à partir. Pourquoi sa mère tient-elle absolument à garder Samuel prisonnier ? La question est au centre de la relation mère-fils, ladite relation étant elle-même le cœur du scénario (le rapport à la mamma, chez les Italiens, c’est un sujet important). Il nido est par conséquent un film-énigme, parfaitement écrit et captivant, où l’on peut relever au fil des scènes tous les indices qui permettront aux plus sagaces d’anticiper la chute, vraiment surprenante. Alors le film de Roberto De Feo annonce-t-il vraiment un retour en grâce du fantastique italien ? Il est trop tôt pour le proclamer, mais franchement, la nostalgie ayant ses limites, mieux vaut se réjouir de pouvoir profiter d’une œuvre comme celle-là que d’essayer ad nauseam de dénicher de maigres qualités imaginaires dans les derniers films de Dario Argento !

Il nido est sorti l’été dernier dans les salles italiennes, et il a été présenté en France à l’édition 2019 du PIFFF. On attend une date de sortie officielle française, au cinéma comme en VOD…