Apparue dans Underworld: Awakening et le thriller d’action Kite, inédit chez nous, la mignonne India Eisley se pavane dans le rôle-titre de la « Belle endormie », ses prunelles immenses apportant une indéniable touche de charme à cette adaptation contemporaine et horrifique de Dornröschen des frères Grimm. Tiré en fait d’un comic éponyme paru l’an dernier, The Curse of Sleeping Beauty rappelle ses origines graphiques par le biais de sa superbe affiche et, surtout, par sa direction artistique franchement réussie (même si le style général s’inspire pas mal du design de Silent Hill). Le réalisateur indonésien Pearry Teo — un gars lui-même looké, portant tatouages et chapeau de cowboy, par ailleurs co-auteur de la B.D. d’origine — s’est sûrement régalé à cadrer la foisonnante collection d’objets ésotériques qui encombrent le théâtre de l’action, une grande bicoque mystérieuse, plusieurs fois centenaire, forcément hantée. En hérite Thomas (Ethan Peck), un jeune artiste-peintre neurasthénique rêvant chaque nuit d’une jolie jeune femme alanguie, qu’il éveille d’un baiser. Et si la belle attendait son prince, perdue dans les ténèbres de la maison ?

Le spectacle est donc flatteur pour l’œil. Pour l’esprit, c’est une autre affaire, car passé le cap de la séduction visuelle, on a tôt fait de déchanter face à une mise en scène bien mollassonne qui compile nombre de poncifs du cinéma de trouille actuel (exploration de pièces sombres à la lampe-torche, apparitions furtives dans le dos des personnages, etc.). Mais par-dessus tout, le scénario, grossièrement écrit, ne fait pas honneur au célébrissime conte et se vautre dans la facilité. Pour suivre sans ciller l’intrigue besogneuse, il faut gober tout rond d’énormes couleuvres — des boas ! — comme, par exemple, les saillies ahurissantes de deux personnages d’experts hautement improbables (et du reste très mal joués !) que le réalisateur-scénariste sort de son chapeau pour que les héros, face à une énigme surnaturelle, trouvent fissa réponse à tout. L’incohérence globale culmine lors de la conclusion, qui n’en est pas une, dénouement en pointillés qui pourrait à la rigueur passer pour une fin ouverte s’il n’était pas si mal amené — tel quel, on a juste l’impression que le générique démarre en sautant la dernière bobine ! Inutile de s’appesantir plus, tout cela est assez indigne, The Curse… se pose comme un vrai navet. Un nanar joli, mais un navet tout de même. Pearry Teo n’a plus qu’à bouffer son stetson en cuir, priant pour que les esprits vengeurs de Perrault et des Grimm ne viennent pas le taquiner, et la Belle peut retourner se coucher.

The Curse of Sleeping Beauty a fait partie de la sélection de l’édition 2016 du BIFFF, en avril. Le film est également sorti aux États-Unis en mai dans un circuit de salles limité. Aucune date d’exploitation prévue en France pour le moment…