Un cataclysme de nature inconnue a laissé la ville — le monde ? — à l’état de ruines. Les décombres s’étalent à perte de vue, et c’est dans cet environnement désolé que nous faisons la connaissance d’Evy, rousse sculpturale à la psychologie simplette qui promène ingénument sa nudité entre les blocs de béton éventrés. À cette nouvelle Ève d’une ère d’apocalypse les cieux envoient bientôt un Adam en la personne d’un parachutiste au prénom peu biblique, Wally. Une fois atterri, le mâle n’a plus que faire de son équipement. Il se déleste lui aussi de tout vêtement et, le sexe dressé, entreprend aussitôt Evy qui l’accompagnera dans cette aventure sans jamais lui donner l’occasion de débander…

Dessinateur à la longue carrière et aux cent pseudonymes, le Français Riverstone a, entre autres, illustré une parodie érotique d’Alice de Lewis Carroll (avec la complicité de Mandryka, un ouvrage édité par Dargaud), de même qu’il a publié de nombreuses planches dans la presse adulte, par exemple Judith et Holopherne, Gomorrhe ou Nagarya, des titres qui furent à lire dans les pages de la défunte revue Bédé Adult’ avant d’être édités ensuite en albums. Il en est de même avec ce Ruines, récit initialement sorti en 2005 (sous le titre Evy en ruines) et auquel l’éditeur Tabou donne aujourd’hui sa chance sous forme d’album. Que se passerait-il, interroge Riverstone, si la première femme d’un monde nouveau n’était qu’une gentille gourdasse ? Bah, peu importe l’intelligence, l’essentiel, somme toute, étant qu’Evy donne à son Adam l’envie de s’accoupler pour repeupler le monde. C’est donc ce qui se produit, à maintes reprises et dans de multiples positions, le tout ponctué des envolées verbales surréalistes de Wally, jamais à court de métaphores extravagantes pour complimenter le cul de sa belle. L’histoire de SF porno se déroule sur un rythme assez plan-plan, au fil de pages dont la composition ne varie presque jamais (trois vignettes de format panoramique par page), mais les gesticulations de la jolie Evy, qui se déplace souvent à quatre pattes devant son homme au physique de culturiste, parviennent à nous faire tourner les pages avec un certain intérêt. Bien entendu, et vous l’aurez pigé à la lecture de ce paragraphe, l’ouvrage est à proscrire pour tout militant couteau entre les dents de la cause féministe, cela dit Riverstone en a commis bien d’autres, au cours de ses décennies d’activité, à même de faire hurler des légions entières de partisans du politiquement correct.

En librairie depuis le 18 août 2020.