Auteur en 2011 d’un petit found footage horrifique indépendant, Skew, qui a bien tourné en festival, le Canadien Sevé Schelenz s’est demandé ensuite quoi faire de sa caméra. Retenant une idée de son agent — au sens commercial aiguisé —, le gaillard s’est lancé dans la confection d’un second film d’horreur, « avec plus de sang et plus de nichons ». Ces critères posés, il n’y avait plus qu’à échafauder un script diabolique où des monstres sanguinaires s’en prennent à un casting topless. Welcome to Peelers !

Peelers appartient donc au sous-genre méconnu du film d’horreur se déroulant dans une boîte de strip-tease. En fait, la catégorie n’est pas souvent mise à l’honneur dans les encyclopédies du cinéma : à part l’auguste The Gore Gore Girls (1972) de H.G. Lewis et les très bons From Dusk Till Dawn (1995) et Planète Terreur (2005), tous deux signés Robert Rodriguez, le genre n’a pas été jusqu’ici très prolifique, en tout cas d’un point de vue qualitatif. Il y a pourtant un potentiel que notre jeune ami Schelenz a tâché de saisir à bras le corps. La comédienne Wren Walker mène la farandole en patronne de bar qui couve d’un œil maternel la petite troupe de ses effeuilleuses. « Blue Jean » (son surnom) s’apprête néanmoins à fermer boutique : elle a signé l’acte de vente de son club, cette nuit sera sa dernière derrière le zinc. Et voilà-t-y-pas que quatre porteurs d’un virus « zombifiant » déboulent dans le troquet pour y vider des téquilas.

Les origines de la contamination imaginée par Schelenz et la scénariste Lisa DeVita (qui apparaît dans un petit rôle) vont s’avérer un peu bancales, mais on a le regard ailleurs : dans le rôle-vedette de Blue Jean, Wren Walker a une sacrée dégaine. Sélectionnée parmi deux cents postulantes, la brune au décolleté magique, dans l’écrin de son bistrot, fait songer à Médusa, la tenancière « bad ass » de La Ruelle Sombre, cabaret glauque fréquenté par le mort-vivant jouisseur et philosophe Wormwood dans la B.D. éponyme de Ben Templesmith. La comparaison vaut compliment. Blue Jean manie la batte de base-ball comme personne, et ce talent lui sera bien utile lorsqu’il s’agira de faire sauter les boîtes crâniennes des malfaisants. Avant la sarabande de cabezas éclatées, Sevé Schelenz aura pris soin de planter agréablement le décor en gratifiant l’audience de numéros de strip pleins d’entrain, à l’inverse des attaques de zombies qu’un montage mollasson aura du mal à rendre excitantes. Pour tout dire, les épisodes gore ne sont pas très cohérents (les enragés bavent et grognent comme des bêtes sauvages, pourtant ils se servent non sans adresse de toutes les armes qui leur tombent sous la pogne, couteau, tronçonneuse et autres !), et les péripéties les plus farfelues ne sont pas toutes à se taper sur les cuisses. Mais bon, Wren Walker alias Blue Jean justifie à elle seule qu’on voie le film, et qu’on le voie bien jusqu’au bout : le générique de fin s’interrompt après 30 secondes de défilement pour nous dévoiler une longue scène dénudée en flashback qui n’est rien moins que le clou du show, à s’en faire sauter le cardio ! Miss Wren, chapeau !

Peelers a été sélectionné en 2016 dans des dizaines de festivals un peu partout dans le monde : en Europe, on a pu le voir à Sitges, au Festival of Zombie Culture (oui, ça existe, ça se passe à Leicester, England), en France à L’Absurde Séance à Nantes… Impossible de dresser ici la liste complète. Le film sortira fin juin en DVD et blu-ray aux États-Unis. Pour la France, eh bien, patience…