Tout commence par une projection cinématographique. Une conférence sur les jeunes gens qui il y a cent ans ont tenté de supprimer François-Ferdinand et qui auraient pu faire basculer le monde dans le chaos. Le conférencier frileux et prudent dans ses réponses et ses analyses continue la présentation lorsque l’écran se fige, en justifiant ainsi l’Histoire officielle : les murs qui séparent les pays européens. Car en cet été 1914, les tensions ont été à leur comble. Pourtant l’attentat ayant été déjoué, la France et l’Allemagne se sont réfugiée derrière des murs de fortifications : La ligne Maginot pour la France, la ligne Siegfried pour l’Allemagne.

Depuis l’Europe s’est figée dans une sorte d’attentisme qui a tout bloqué. Les Français comme les Allemands vivent dans une grande pauvreté, le monde semble avoir peu évolué technologiquement, les files d’attente devant les magasins sont le lot quotidien de millions d’individus et la condition féminine en est restée à ses balbutiements. C’est dans ce contexte qu’Alain Grousset va faire évoluer son héroïne Constance. Cette jeune femme qui a passé de nombreux concours administratifs, s’est trouvé un petit travail de vendeuse pour être indépendante ce qui est très mal vu dans une société où la seule place acceptable pour les femmes est au foyer ou dans sa famille. Sa famille est d’origine alsacienne et a maintenu le souvenir de cette Alsace perdue à la guerre de 1870 en transmettant les souvenirs mais aussi la langue régionale. Constance parle ainsi le Français et l’Alsacien couramment mais aussi l’Allemand et l’Anglais. Cette brillante jeune femme va un jour faire une rencontre qui va bouleverser sa vie et la propulser dans l’Histoire.

Les services secrets anglais et français sont en effet sur les dents car les Allemands sont sur le point de maîtriser la bombe atomique. Une course poursuite pour rattraper leur retard est en route et c’est dans cette aventure que va intervenir Constance.

 Alain Grousset  nous propose ici une uchronie bien écrite à l’histoire et aux héros attachants qui nous emportent rapidement. Facile d’accès et de lecture elle permet d’imaginer une des multiples versions de ce qu’aurait pu être notre monde sans la Première guerre mondiale. On y retrouve les codes propres à ce type d’histoire, c’est à dire, une société figée, voir dictatoriale, des mouvements secrets qui tentent de renverser le fonctionnement du système et de faire évoluer les choses, le décalage entre la vie quotidienne de la masse et la réalité quotidienne mais aussi scientifique et technologique des plus pauvres ou d’autres pays n’ayant pas connu le problème. Efficace et très bien fait, vous aurez du mal à lâcher ce court roman. A découvrir.