Après les récents Arès et Death Race 2050, les tensions de l’époque se conjuguent à nouveau avec nos penchants coupables pour les jeux TV et les émissions de téléréalité. Le scénario d’anticipation d’Immigration Game puise son inspiration dans l’actuelle crise des réfugiés en Europe : dans un avenir proche, tous les pays de l’U.E. ont fermé leurs frontières aux migrants, à l’exception de l’Allemagne, qui accepte encore les demandeurs d’asile à condition qu’ils prennent part à un show meurtrier dans lequel ils mettent leur vie en jeu. Sous l’œil des drones de la télé, les réfugiés ont 24 heures pour rallier à pied un point précis de Berlin et gagner leur citoyenneté allemande. À leurs trousses, des chasseurs, des citoyens lambda qui trouvent dans le « jeu » un défouloir les autorisant à mettre à mort leurs proies…

La mise en scène de Krystof Zlatnik est énergique, le réalisateur propose une captation au moyen d’une caméra portée très mobile et il s’y connaît pour créer la tension lors des séquences d’affrontement entre les héros de l’histoire, des « runners » pourchassés dans une ville-ennemie, et les affreux qui veulent leur faire la peau. Maintenant, sur le fond, le postulat d’Immigration Game est quand même dur à avaler, et l’écriture est loin d’être assez solide pour nous faire accepter sans broncher que des hommes et des femmes puissent être saignés en pleine rue, dans une grande capitale moderne, sans que personne y trouve à redire (mais qui donc gouverne le pays ? Mystère. Sans doute plus Angela Merkel !). En fait, Zlatnik, dont c’est le premier long métrage, a opté pour une curieuse méthode en bossant non avec un script digne de ce nom mais à partir d’un canevas d’une trentaine de pages support à de nombreuses improvisations. D’où l’impression tenace d’avoir sous les yeux une sorte de brouillon filmé. L’absence totale d’humour, fût-il cynique, et le manque flagrant de moyens n’aident pas non plus à gober le spectacle, le corollaire médiatico-ludique restant notamment hors champ (hormis une ou deux apparitions fugaces de drones-caméras pour nous rappeler qu’il s’agit d’une émission de télé, on ne voit rien du « jeu » et on n’a pas d’autre choix que supposer l’engouement qu’il suscite dans la population). La mayonnaise a donc beaucoup de mal à prendre et tourne même à l’aigre lors du finale, d’une incohérence qui, ma foi, laisse pantois. Frustrant à regarder (malgré de très bons comédiens), et pas très drôle non plus à chroniquer (bon ça, c’est le problème du seul rédacteur), Immigration Game sera disponible en DVD à compter du 14 juin (Marco Polo Production).